jeudi 2 mars 2017

L’Italie, colonie du Vatican

L’Italie, colonie du Vatican

Pour l’abolition du Concordat

par Lucien Lane, detto Luciano l’Asino

(Le choix de l’Asino – par Lucien Lane, detto Luciano l’Asino – pour présenter la conférence n’est pas sans importance. Je reprends mon pseudo de Lucien Lane, car il renvoie directement à L’Asino un journal anticlérical et antifasciste italien (Rome), physiquement attaqué plusieurs fois par les squadre fascistes et détruit par Mussolini en 1925, il disparaît.)


Suite aux Accords du Latran et au Concordat signés en 1929 par Mussolini avec le Vatican, l’Italie était devenue une colonie du Vatican : religion (catholique) d’État, enseignement de la religion catholique obligatoire dans l’enseignement public (et rien d’autre), rétribution des ecclésiastiques à charge du Trésor public, cession des actes d’état-civil à l’Église catholique et d’autres éléments encore.

Garibaldi se retournait dans sa tombe.

À la création de la République italienne, après la chute du régime fasciste, ces accords furent introduits dans la Constitution du nouvel État le remettant ainsi – et par conséquent, tout le peuple italien – à nouveau sous la coupe du Vatican.
Garibaldi se retournait une fois encore dans sa tombe.

En 1984, le gouvernement Craxi modifia la donne et mit fin aux effets dommageables du Concordat : fin de la religion catholique d’État, de la fréquentation obligatoire du cours de religion catholique, du financement à charge du trésor public des personnels ecclésiastiques et d’autres éléments encore.
Où en est-on aujourd’hui ?
Une question complexe et une réponse simple : l’Italie est toujours une colonie du Vatican.


Garibaldi se tourne et se retourne… Quand sera-t-il enfin libéré de ce cauchemar ?



lundi 28 mars 2016

LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER

LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER



Nouvelle version française – LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER – Marco Valdo M.I. – 2016
à partir de la
Version française – LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER – Marco Valdo M.I. – 2008Chanson italienne – Il testamento del parocco Meslier – Anton Virgilio Savona – 1972








Mes chers amis, puisqu'il ne m'auroit pas été permis et qu'il auroit même été d'une trop dangereuse et trop facheuse consequence pour moi de vous dire ouvertement, pendant ma vie, ce que je pensais de la conduitte et du gouvernement des hommes, de leurs religions et de leurs moeurs, j'ai résolû de vous le dire au moins après ma mort... (JEAN MESLIER - 1729)

Ah, Lucien l’âne mon ami, en ces temps troubles, je suis allé au spectacle pas plus tard qu’hier à Bruxelles pour écouter la bonne parole du curé Meslier. On n’était pas vraiment très nombreux, car la salle était petite et puis, on n’aurait pas mis grand monde non plus dans l’église de Jean Meslier à Étrépigny.

Que voilà une bonne idée d’aller écouter la bonne parole d’un si bon curé, dit Lucien Lane en riant.

En effet, tu ne pourrais mieux dire, car c’était un excellent sermon, un très remarquable prône dans lequel notre curé athée s’en prend directement à toutes les religions – je dis bien à toutes les religions, y compris in primis les monothéismes, les religions du Livre. Mais pas seulement, cependant.

Pas seulement aux religions et à qui donc peut-il faire de tels reproches, de si grandes accusations ?, dit Lucien l’âne en levant les oreilles vers l’infinitude des espaces et des temps.


Eh bien, notre bon curé, qui connaît la vie qui est faire aux pauvres, s’en prend également aux riches et aux puissants – comme nous le faisons à la suite de Pierre Valdo – quand nous évoquons la Guerre de Cent Mille Ans que les riches et les puissants (les mêmes) font aux pauvres afin de les dominer, de les écraser, de les ruiner, de les mépriser et de s’assurer en propre les plus énormes richesses et les plus grands privilèges. C’était vrai au temps de Valdo, c’était vrai au temps de Meslier et c’est toujours vrai de notre temps. Et je me suis souvenu qu’il y a déjà huit ans, j’avais fait une version française d’une chanson italienne d’Anton Virgilio Savona, intitulée précisément « Il Testamento del parocco Meslier ». Mais, elle s’était un peu perdue à l’horizon.

C’est un peu normal, car depuis ce temps-là, à vue de nez, tu as fait plusieurs centaines de versions françaises de toutes sortes. Il est assez compréhensible que tu perdes de vue les plus anciennes.


Et donc, je me suis dit qu’il fallait profiter de l’occasion pour la ramener au jour et tant qu’à faire, la toiletter un peu et en donner une nouvelle version. Restait à la publier : bien évidemment, dans les Chansons contre la Guerre et tout aussi évidemment sur les blogs : le mien (Canzones) et le tien, celui de l’Asino resuscitato.

C’est un bon jour que ce lundi de Pâques pour une résurrection, dit Lucien l’âne en brayant un bon coup. Maintenant, voyons voir cette nouvelle version et reprenons notre tâche qui consiste à tisser le suaire de ce vieux monde crédule, croyant, superstitieux, religieux, sectaire et cacochyme.


Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Dernières nouvelles de Jean Meslier
Depuis Bruxelles 28 mars 2016.


Il s’agit de signaler deux livres à propos de Jean Meslier :

Celui de Serge Deruette :

LIRE JEAN MESLIER, CURÉ ET ATHÉE RÉVOLUTIONNAIRE (http://www.aden.be/index.php?aden=lire-jean-meslier---cure-et-athee-revolutionnaire)
Il s’agit de voir aussi cet extrait de sa conférence à propos de Meslier : https://www.youtube.com/watch?v=Bs1dvuyWnEI

Celui de Jean-François Jacobs :
LA BONNE PAROLE DU CURÉ MESLIER
chez le même éditeur (Aden)
et voir cette présentation du spectacle en un extrait de la véritable performance d’Alexandre Von Sivers
dont j’extrais (pour l’édification générale) cette petite citation :

« Unissez-vous donc, peuples, si vous êtes sages !
Toutes les religions ne sont que des inventions humaines.
La matière ne peut avoir été créée.
Elle a d’elle-même son être et son mouvement.
Il n’y a point de Dieu. »

À entendre certains qui discourent sur les « racines chrétiennes de l’Europe », dont je rappelle qu’il s’agit d’une marchandise d’importation, d’une pacotille pour bons sauvages, d’une colonisation cultuelle par des missionnaires venus du Moyen-Orient, je me dis qu’il est bon et juste de leur opposer Jean Meslier, né dans les Ardennes et solidement enraciné dans une des plus belles régions européennes.

Évidemment, également, une publication dans l’Asino s’impose, dit Lucien l’âne.
C’est ce que nous allons faire…
Car, comme les paysans (les terroni) de Lucanie, région du sud de l’Italie, anciennement Grande Grèce, pas loin d’Élée :
« Noi, non siamo cristiani, siamo somari » (Nous, nous ne sommes pas des chrétiens, nous sommes des bêtes de somme, des gens, des mécréants, des athées…)

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




Commentaire à la version de 2008.

Jean Meslier (Mazeny, Champagne 1664 – Étrépigny, Champagne 30 juin 1729), curé d’Étrépigny, en Champagne (commune proche de Charleville-Mézières, où naquit et grandit plus tard un autre imprécateur de haut vol, le dénommé Arthur Rimbaud – actuellement département des Ardennes – 08 – Région Champagne-Ardennes) eut cette idée de publier – en les déposant sous forme de testament – ses pensées et ses colères à titre posthume. Est-ce parce qu’il y travailla jusqu’au bout de sa vie ou en application d’un principe de précaution ? Toujours est-il que ce texte et sa lettre aux paroissiens qui le présente, ont surgi à son décès, puis ont disparu et par la suite, ont connu des fortunes diverses avant de pouvoir venir au jour en édition intégrale plus de deux cents ans après ce dépôt, qui pourtant les a sauvés. Dans cette aventure du « Mémoire des pensées et sentiments de Jean Meslier », le caviardage de Voltaire fut assurément une vilénie (Meslier à la sauce déiste de Voltaire est à la correction littéraire et intellectuelle, ce que le fast-food est à la cuisine – une trahison !), mais l’arrangement voltairien eût quand même le mérite (involontaire) d’attirer l’attention sur les 3 exemplaires que Jean Meslier avait déposés au greffe. Grâce soit rendue, dès lors, au hollandais Rudolf Charles, éditeur de son état, qui tenta la première intégrale !

Quant à savoir pourquoi Jean Meslier n’a pas publié de son vivant, j’ai ma petite idée à ce sujet. Tout simplement, il faut quand même connaître un peu les Ardennes pour comprendre que un : trouver un éditeur était en soi une odyssée, deux : qu’écrire le « Mémoire » (outre que de tenir sa charge de curé), était aussi un formidable défi et trois : qu’enfin, en rédiger les copies prenait du temps et était essentiel pour en assurer la postérité. Le reste est sans doute dû à la volonté d’aller le plus loin possible dans la rédaction. Jean Meslier ne s’en cache pas lui qui commença son texte par : « Mes chers amis, puisqu’il ne m’aurait pas été permis.. », et dit – en substance ensuite – « Je vous l’aurais bien dit de vive voix, juste avant de mourir, mais je ne suis pas sûr (ceci traduit en langage moderne) que j’aurai encore toute ma tête à ce moment… Donc j’ai pris la précaution d’écrire ». En ce temps-là, la mémoire des bûchers de l’Inquisition illuminait encore l’Europe.

Par ailleurs, on n’a pas fini de disserter sur Jean Meslier. Je n’en dirai pas plus ici, sauf à reprendre ce que les paysans de Lucanie disaient au temps de Carlo Levi (1936) : « Noi, non siamo cristiani, siamo somari » (« Nous nous ne sommes pas des chrétiens, nous sommes des bêtes de somme »), sauf à reprendre la phrase de Jean Meslier qui excommunie quiconque la prononce ou la reproduit : « Je voudrais, et ce sera le dernier et le plus ardent de mes souhaits, je voudrais que le dernier des rois fût étranglé avec les boyaux du dernier prêtre. »
Puis-je ajouter, dit Marco Valdo M.I., que c’est aussi le mien de souhait – et pas le dernier.
Et, comme disait cet autre mécréant anarchiste de Brassens : « Et tant mieux si c’est un péché, nous irons en enfer ensemble… Il suffit de passer le pont… »

Le texte qui précède date du 2 août 2008, date de son insertion dans les Chansons contre la Guerre et il ne me paraît pas utile d’y changer, d’y retrancher ou d’y ajouter quelque chose.
Sauf que j’y adjoindrai volontiers les commentaires que j’en avais faits depuis lors dans les Chansons contre la Guerre. À savoir :

Notre bon Meslier

(date d’insertion dans les Chansons contre la Guerre : 20 mai 2010)

Pour en revenir à notre bon Meslier, curé de son état, il est proprement indigne de lui imputer la méconnaissance du christianisme, fût-il des origines. Bien au contraire, c’est de le bien connaître qu’il en eut la dégoûtation. Il suffit de lire les écrits de Jean Meslier pour s’en rendre compte de manière tout à fait objective. Par ailleurs, il ne pouvait ignorer cela ayant subi le « séminaire » de Châlons, été ordonné prêtre et nommé curé le 7 janvier 1769 curé d’Étrépigny et de But dans les Ardennes.

Cela dit, il voyait clair dans le jeu des illusions chrétiennes et plus spécifiquement, catholiques, apostoliques et romaines. Il disait, par exemple : « …vous adorez effectivement des faibles petites images de pâte et de farine, et vous honorez les images de bois et de plâtre, et les images d’Or et d’Argent. Vous vous amusez, Messieurs, à interpréter et à expliquer figurativement, allégoriquement et mystiquement des vaines écritures que vous appelez néanmoins saintes, et divines ; vous leur donnez tel sens que vous voulez ; vous leur faites dire tout ce que vous voulez par le moyen de ces beaux prétendus sens spirituels et allégoriques que vous leur forgez, et que vous affectez de leur donner, afin d’y trouver, et d’y faire trouver des prétendues vérités qui n’y sont point, et qui n’y furent jamais. Vous vous échauffez à discuter de vaines questions de grâce suffisante et efficace. Et en plus, vous vilipendez le pauvre peuple, vous le menacez de l’enfer éternel pour des peccadilles, et vous ne dites rien contre les voleries publiques, ni contre les injustices criantes de ceux qui gouvernent les peuples, qui les pillent, qui les foulent, qui les ruinent, qui les oppriment et qui sont la cause de tous les maux, et de toutes les misères qui les accablent. »

J’insiste pour qu’on relise la dernière phrase, dit Lucien l’âne, on dirait qu’elle parle de l’Italie actuelle et de bien d’autres pays.

Je la relis, Lucien mon ami : « Et en plus, vous vilipendez le pauvre peuple, vous le menacez de l’enfer éternel pour des peccadilles, et vous ne dites rien contre les voleries publiques, ni contre les injustices criantes de ceux qui gouvernent les peuples, qui les pillent, qui les foulent, qui les ruinent, qui les oppriment et qui sont la cause de tous les maux, et de toutes les misères qui les accablent. »

En effet, dit Lucien l’âne en redressant la tête et en lançant d’un coup de cou sec sa crinière en arrière pour dégager ses yeux, que cela plaise ou non aux cagots, Jean Meslier avait une vision du monde assez lucide.

Ainsi parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.

Et

Jean Meslier aurait connu le destin du Chevalier de la Barre, si...
(3 juin 2015)

Jean Meslier était un homme intelligent. De ce fait, il avait très bien perçu que s’il voulait atteindre son but : transmettre et faire connaître la nécessité de l’athéisme et la corollaire réfutation de(s) dieu(x), en ces temps où on torturait joyeusement les incroyants, avant de les massacrer, il était prudent d’être prudent et d’user de discrétion. Ce pourquoi, il attendit d’être mort pour diffuser son Testament.
Eût-il fait autrement, l’eût-il fait de son vivant… Il aurait connu le destin du Chevalier de La Barre (ou de tant d’autres qui finirent sur les bûchers catholiques) et ses textes auraient connu le même destin, de sorte que nul n’aurait pu savoir ce qu’il avait le souhait de faire connaître.
Quant au destin du Chevalier de La Barre, voici :
Quarante ans plus tard, le Chevalier de la Barre, un jeune homme de 20 ans – moins prudent – finira torturé, décapité et enfin, brûlé pour avoir chanté avec ses amis et n’avoir pas tiré son chappeau au passage de capucins…
Voici le témoignage de Voltaire :
Dans son article « Torture » de l’édition de 1769 du Dictionnaire philosophique, Voltaire fait le récit du martyre du chevalier de La Barre :
« Lorsque le chevalier de La Barre, petit-fils d’un lieutenant général des armées, jeune homme de beaucoup d’esprit et d’une grande espérance, mais ayant toute l’étourderie d’une jeunesse effrénée, fut convaincu d’avoir chanté des chansons impies, et même d’avoir passé devant une procession de capucins sans avoir ôté son chapeau, les juges d’Abbeville, gens comparables aux sénateurs romains, ordonnèrent, non seulement qu’on lui arrachât la langue, qu’on lui coupât la main, et qu’on brûlât son corps à petit feu ; mais ils l’appliquèrent encore à la torture pour savoir combien de chansons il avait chantées, et combien de processions il avait vues passer, le chapeau sur la tête. »
Pour de plus amples informations :
Et pour que nul n’en ignore, dit Lucien l’âne, il faudra en faire une chanson et même deux, une pour Meslier, une pour La Barre.
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER
nouvelle version française – 28 mars 2016.



Vous avez sur le râble le fardeau pesant
Des princes, des prêtres, des tyrans et des gouvernements;
Des nobles, des moines, des chanoinesses et des prélats,
Des fripons de garde-sel et de tabac et des magistrats.
Vous avez sur le râble les puissants et les guerriers,
Les ineptes, les inutiles et les rusés et les douaniers,
Les riches qui volent pour s’engraisser,
Laissant le peuple entier –
Entretemps – crever.

Abattez les riches condottières
Et les princes !
Ce sont eux les diables,
Pas ceux de l'enfer !


Des vermines qui laissent au paysan
Seulement la paille du sarrasin
Et la lie du vin.
Ils théorisent paix, bonté et fraternité
Et puis, ils légalisent les trônes et l’inégalité.
Ils ont inventé le Dieu des puissants
Pour endormir et faire plier
Les corps et les esprits. Ils ont inventé
Les démons et les enfers
Pour faire trembler et taire
Les pauvres et les sans-terre.

Abattez les riches condottières

Et les princes !
Ce sont eux les diables,
Pas ceux de l'enfer !


Ce ne sont pas les démons de la cour inférieure
Après la mort, vos ennemis les pires ;
Non, vos ennemis, ce sont ces gens qui accusent,
Pourrissent votre vie et vous anéantissent !
Et si vous vous unissiez, vous pourriez vous défendre
En usant du boyau de prêtre pour les pendre;
Ainsi, vous ne seriez plus leurs esclaves
Mais, enfin, du fruit de votre travail, les maîtres !

Abattez les riches condottières
Et les princes !
Ce sont eux les diables,
Pas ceux de l'enfer !

vendredi 11 mars 2016

DU CÔTÉ DES BÊTES


DU CÔTÉ DES BÊTES

Version française – DU CÔTÉ DES BÊTES – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson italienne – Dalla parte delle bestie – Mimmo Cavallo – 2013




Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens



Moi aussi quand j’étais petit, je jouais aux Cow-boys- Indiens, lesquels, malgré les westerns de John Ford et John Wayne, me plaisaient seulement lorsqu’ils se tiraient dessus. Peut-être déjà quand j’étais petit, les perdants me plaisaient plus ; pour parler comme Finardi « Nous sommes tous Vil Coyote ». Et alors ce morceau pourrait donner le départ à une série de chansons pour un parcours « Du côté des perdants ». 

Dialogue Maïeutique

Mon cher Lucien l’âne, cher ami, je ne sais si chez les ânes, on joue aux cows-boys (il y a plusieurs boys, mais aussi ils gardent plusieurs vaches ; généralement, un troupeau ; d’où, la nécessité de mettre au pluriel les vaches – en anglais cow ; et les gars, en anglais boy) et aux Indiens (il y a généralement, plusieurs Indiens), aux gendarmes et aux voleurs (voir ce qui est dit des vaches et des gars), aux brigands et aux carabiniers…


En effet, les ânes ne jouent pas à des jeux aussi « humains ». Mais je les connais quand même ; quoique du temps où j’étais encore un garçon, je n’ai jamais joué à de pareils jeux ; on jouait au gibier-chasseurs ; il est vrai que certains jouaient aux Spartiates – Athéniens ou aux Grecs – Perses, aux citoyens – ilotes, aux maîtres – esclaves. Une remarque piquante, si tu veux bien l’entendre : je n’ai jamais entendu, ni a fortiori, vu jouer aux fascistes-communistes, ni aux patrons-ouvriers… sauf chez les adultes, évidemment !


Bref, en matière de jeux, ce sont des universaux. On les trouve partout sous des dénominations et des formes diverses. Ces jeux sont les premières manifestations formalisées de la Guerre de Cent Mille Ans dans la vie enfantine. Avant cela, dès les premiers instants de socialisation, dès que se forment des groupes d’enfants, de contemporains, on voit apparaître des comportements de dominants et des comportements de dominés. C’est une chanson où dans la mythique guerre, dans la guerre fantasmée, le « héros », entretemps déjà plus âgé, prend parti pour les « perdants ». Je n’aime d’ailleurs pas trop cette formulation. Je parlerais plutôt volontiers d’un côté : de révoltés, d’agressés, de défenseurs et de l’autre côté : d’attaquants, d’agresseurs et de dominateurs. C’est donc une chanson qui pose à sa manière la question centrale de la Guerre de Cent Mille Ans et qui, en même temps, montre l’importance des jeux d’enfants dans la formation de la personnalité du petit humain. Sans doute même qu’elle dévoile quelque chose de plus profond qu’on ne l’imagine habituellement : le fait que la division en deux camps opposés de l’humanité s’établit très tôt dans l’existence. Je dis ça sans chercher à trancher la question de l’éventuelle propension génétique ou d’un acquis de socialisation ; même si, j’ai fortement tendance à imaginer que ces types de comportement sont des traits sociaux qui sont le résultat d’une éducation ou d’une absence d’éducation, souvent induit. Une sorte d’imprégnation par le milieu dans lequel le jeune enfant baigne. Ce qui ferait que sauf changement volontaire ultérieur, le pli est pris et on se retrouve de l’un ou de l’autre côté.


Si je comprends bien, dit Lucien l’âne en fronçant ses énormes sourcils, on est très rapidement soit du camp des riches et des puissants, soit de celui des pauvres ou des faibles. La Guerre de Cent Mille Ans commence très tôt chez les hommes. Mais alors, il n’en reste pas oins que si ce positionnement social se fait par imprégnation, il échappe à la volonté de l’enfant ; il lui est instillé, il s’impose dès le plus jeune âge.


En effet, c’est comme le baptême, c’est comme un conditionnement qui se fait en dehors de la volonté de la personne elle-même (trop jeune encore pour déjà en avoir une très développée) et qui lui est imposé. Et comme pour l’attachement à une croyance, à une religion, seule la raison peut redresser la barre. Évidemment, tout dépend du côté où l’on se place ; on peut choisir d’aller dans le sens imposé ou dans l’autre ; soit maintenir le cap, soit s’orienter de l’autre côté. Ce choix est le résultat de ce processus souterrain qu’on appelle la pensée et la conscience morale. Dans la conscience de l’enfant s’établit progressivement une sorte de cartographie, un dictionnaire, un guide interne, une boussole qui lui indique les choses qui se font, celles qui ne se font pas ; ce qui est acceptable, ce qui ne l’est pas. Cependant, l’imprégnation par le milieu est très précoce et il est très difficile de s’en départir ; d’autant plus difficile qu’on la renforce par l’éducation. C’est ce qui explique que les religions (avec ou sans Dieu(x)) entendent mettre la main sur l’éducation dès la plus petite enfance afin de pouvoir museler toutes les tentatives d’émancipation des enfants et des jeunes et par voie de conséquence, également, celle des adultes et de toute l’humaine nation.


En effet, dit Lucien l’âne, l’enjeu est de taille… Quant à moi, j’aime beaucoup cette expression qui donne le titre à la canzone : « Dalla parte delle bestie – Du côté des bêtes », qui me paraît aller dans le même sens que noter propre antienne : « Noi, non siamo cristiani. Siamo somari – Nous, nous ne sommes pas des chrétiens, nous sommes des bêtes de somme. » À présent, il nous reste à reprendre notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde encombré de Dieux, de prophètes, de religieux et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens
Qui étaient chassés par les Américains.
Du côté des bêtes.
Toute ma vie contre la peste,
Contre les premiers de classe,
Les espions des maîtresses.

Je me rappelle au cirque ces lions sans dents,
Au sourire triste, éteint et fatigué de perdants
Et tous ces zèbres, et tous ces singes
Si gais, si sautillants,
Mais dans mon cœur, des momies,
Mais dans mon cœur, des momies
Me persécutaient sans bruit.

Elles mettaient le sel au milieu des cheveux
Et ces regards perçants me lançaient des lazzis.
Il est fou debout sur le bord d’un toit.
Il est fou quand il sort, serrez-le à l’étroit.
Il est fou sur la porte de chez lui, on a écrit :

Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.

Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens
Qui étaient chassés par les Américains.
Du côté des opposants fiers,
Toute ma vie par les sept mers,
Contre les rets des chasseurs,
Et les pièges des trappeurs.
Pauvre de moi, je m’illusionnais, je voulais changer le monde,
Mais je me suis pris des claques
Et maintenant, c’est le fond que je racle.
Mais j’espère au paradis me débarrasser de l’hyène
Qui me poursuit sans gêne,
Dans ma vie sur scène,
Dans ma vie sur scène.

Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.

Et si vous venez me chercher, je suis ici
Dans ce train de dernière classe, oui.
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Du côté des bêtes et des damnés,
Du côté des bêtes et des damnés,
Il y a une bande de pirates,
Du côté des bêtes et des damnés,
Du côté des bêtes et des opposants,
Du côté des bêtes et des opposants.
Toute ma vie par les sept mers et les océans,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes…