mardi 23 juin 2015

LE DIABLE AU PARADIS


LE DIABLE AU PARADIS

Version française – LE DIABLE AU PARADIS – Marco Valdo M.I. – 2014
d'après la version italienne de Riccardo Venturi
Chanson chilienne en espagnol – El diablo en el paraíso – Violeta Parra – 1964

Paroles et musique: Violeta Parra
Album: Recordando a Chile (Una Chilena en París)
Interprétée aussi par Daniel Viglietti





« Tous les animaux sont égaux. Mais certains animaux sont plus égaux que d'autres. »  George Orwell




Aller wunder sî geswigen,
das erde himel hât überstîgen,
daz sult is vür ein wunder wîgen.
Erd ob und himel unter,
daz sult îr hân besunder
vür aller wunder ein wunder.

Qui sait si quelqu'un la reconnaît, cette strophe ; elle est en allemand médiéval, ou mieux, en moyen haut allemand. Je me demandais si quelqu'un la reconnaîtrait, car elle est dans un livre que tous ont lu : Le Nom de la Rose d'Umberto Eco. Le docte Alexandrin (dans le sens d'Alessandria en Piémont, clairement), cependant, ne nous a pas donné la traduction de cette strophe. Elle veut dire ce qui suit :

Tous les prodiges, je tairai
La terre a renversé le ciel
Et ceci vous émerveille
Le ciel en bas, la terre en l'air
Et surtout ceci soit pour vous
Le plus prodigieux des prodiges.

Aussi vieille que le monde, l'histoire du monde à l'envers ; il était, par exemple, à la de base de cette fête de l'ancienne Rome, celle de « semel in anno licet insanire », où pour un jour par an, tout était vraiment renversé et même les esclaves étaient servis par les maîtres. Au Moyen-Âge, elle devint un thème des plus fameux du temps, probablement un moyen répandu, ou un rêve, populaire de s'opposer au « monde en place » – qui était celui de l'Église et des riches. La célèbre strophe en allemand médiéval en est témoin.

Tout ceci seulement pour vous dire où et dans quelles traditions populaires planétaires est allée puiser Violeta Parra. C'était une iconoclaste de premier ordre. Cela se voit même dans son autre chanson, ces « Souhaits à rebours » (Parabienes al revés) qui visent l'institution de la cellule familiale (la Violeta se donnait comme but de miner à la base les piliers). Son monde à rebours, à la chanson authentiquement brillante, semble en effet une sarabande médiévale ; excellente anticléricale et bouffeuse de curés, Violeta ne perd naturellement pas l'occasion de glisser immédiatement le diable dans le paradis, le comble de la subversion oui, mais à la saveur de temps reculés. En réalité, il s'agit d'un « moyen âge » qui connaît le Chili des années 50 est 60, loin de l'an mil : une description féroce de ce qui devait être fait en urgence. Renverser tout un monde, justement. La propagande des torchons comme le « Mercurio » ( "La vérité est une erreur» !"), parfaitement applicable encore aujourd'hui ; les soldats en prison (et combien aurait été opportun de les mettre en prison, on le vit bien en 1973) ; les juges mis au mur ("On fusille les magistrats") ; et ainsi de suite.

Ah oui, il s'agit bien du Chili. Et pas seulement du Chili. Cependant, à souligner à quoi elle se référait, celui de Violeta est un Moyen-Âge qui parle un chilien pointu. Parmi toutes les chansons de Violeta Parra, celle-ci est un des plus dialectale. Des phrases entières incompréhensibles à un non-Chilien. C'est tellement vrai que, lorsque l'Uruguayen Daniel Viglietti la chanta, il dut remplacer les phrases et les mots qu'aucun de ses compatriotes n'aurait compris. Par exemple, « cantalos ricos andan rotosos », en bon castillan, à la place de « los futres andan pililos ». Oui, vraiment un Moyen-Âge de rien ! [RV]




Un Moyen-Âge de rien ? Un monde à rebours ? Voilà bien une chanson étrange, dit Lucien l'âne en se frottant le museau sur l'écorce du sapin. De quoi elle cause ? D'où vient-elle ? Et au fait, qui donc l'a écrite et qui la chante ?


Voilà une bien belle série de questions, mon ami Lucien l'âne au museau gratouillant. Aurais-tu une mouche dans le nez ? Où souffrirais-tu d'une rhinite intellectuelle ? Ou d'une questionnite aiguë ? Heureusement que je te connais et que je sais que tes intentions sont pures et qu'il ne se cache pas là derrière, je ne sais quelle manie policière et investigatrice. Tu n'as rien d'un Papa Schultz et de ses « moyens de vous faire parler », ni de ces gens de services. Reprenons dans l'ordre à rebours : qui la chante ? Violeta Parra. Qui l'a écrite : Violeta Parra. D'où vient-elle ? Du Chili. De quoi elle cause ? De tout, de rien, du monde à l'envers. Et donc, de la réalité, du Chili... Tel qu'il était et selon Riccardo Venturi, du Chili à venir. Mondo alla rovescia que j'ai volontairement traduit par « monde à rebours », en mémoire de J.K. Huysmans et de l'ineffable Des Esseintes, cousin francilien d'Oblomov – lesquels deux pratiquaient vigoureusement le « monde à revers ». Au passage, George Orwell en mit en scène un fameux de monde à la renverse avec sa Ferme des Animaux, où les cochons prennent le pouvoir... Une fameuse parabole sur notre société libérale. Mais j'imagine que tu as déjà médité cette fable moderne...


Sûr que je connais Orwell et j'ai particulièrement bien aimé sa définition de la démocratie où : « Tous les animaux sont égaux. Mais certains animaux sont plus égaux que d'autres. » Nous aussi, on devrait parfois le faire, renverser notre petit monde... Tu serais l'âne et moi, le pantin... Mais en fait, je ne vois pas trop ce que ça changerait. Cela dit, revenons à notre tâche qui est de tisser le linceul et de renverser l'ordre de ce monde imbécile, trop régulier, comptable, inéquitable, étouffant et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



L'homme mange le pré vert
L'âne, les douceurs
La petite-fille commande le grand-père
Et le valet, le roi de coeur.
Je porte l'eau dans une panière
Dessous le lit, je dors,
Je sucre tout à la salière,
Je danse sur la tombe du mort.
« La vérité est une erreur»,
Criait tout nu un tailleur.

Les pages sont couronnés,
Les rois lavent les planchers,
Le diable règne au paradis
En prison vont les soldats.
On récompense les bandits,
On fusille les magistrats,
Au sec nagent les poissons ;
Ainsi finit le monde
Quand dans les mers profondes
Mûrissent les moissons.

Les justes marchent enchaînés
Libres vont les condamnés,
Soixante centimes font un euro,
Et six cent grammes, un kilo.
Les rupins vont tête baissée
Les gras sont rachitiques,
Et danse le paralytique
Sur une machette affûtée.
Trois plus huit égale rien
Compte un mathématicien.

Assis sur le piano,
Ils jouent les mains derrière le dos
Caïn est la plus belle
Pour son frère Abel .
Sur les mains, il fait le beau
Les saints sont querelleurs,
Et bénissent les voleurs ,
Le chien dort dans le berceau,
La lune blanche sort de l'eau,
Le bébé mord l'anneau.

Envoi :

À la fin de l'envoi, l'exemple :
Je viens du monde à rebours,

Et avec votre permission, à mon tour,
Le théâtre, je l'appellerai temple.
« Tout doux, je t'apprécie »,
Dit le bandit à sa prisonnière,
Le plus hérétique est celui qu'il prie,
Les vieux vont à l'école,
Les enfants à la marelle.
Et tous ont un grain de folie.

jeudi 18 juin 2015

AVEC LE LIVRE DANS UNE MAIN ET LA BOMBE DANS L'AUTRE

AVEC LE LIVRE DANS UNE MAIN ET

LA BOMBE DANS L'AUTRE 

Version française – AVEC LE LIVRE DANS UNE MAIN ET LA BOMBE DANS L'AUTRE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Col Libro In Una Mano, La Bomba Nell’altra – Negrita – 2008
Texte et musique : Negrita



Je vous ai compris...



L'auto que tu conduis n'est pas à toi, regarde bien :
Tu la payes tous les jours au fabricant d'eaux usées
Qui va dîner avec les saints
Qui te mettent des bombes dans les poches

Et font des guerres
Où brûlent des garçons comme toi
Qui meurent avec le rêve de protéger un rêve
Et à l'église les gens qui pleurent
Font de la place et se serrent

Il y a toujours au premier rang,
Un ministre qui traite avec le marchand
Qui dîne avec les saints qui lancent les bombes
Et soutirent les sommes et le cycle jamais ne s'interrompt
Ce n'est pas la guerre sainte, mais nous, nous arrivons…

Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre.
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 
Dans le pain, il y a le corps ;
Il y a du sang dans le vin,
Le démon, dans l'or ;
Dans l'humilité, le saint.

Dans le pain, il y a le corps ;
Il y a du sang dans le vin,
Le démon, dans l'or ;
Dans l'humilité, le saint.

Scintille un anneau de métal jaune,
La main pieuse salue le Conseil.
À son poignet, des joyaux vermeils.
Sur un vêtement blanc de lin et de soie.

Le pourpre est un manteau de gloire et de vanterie.
Sur sa poitrine, une croix avec son Saint
Son chant disait : Ne m'immortalisez pas,
Son pleur criait : Ne m'agitez pas,

Dans le pain, il y a le corps ;
Il y a du sang dans le vin,
Que Dieu nous pardonne bien,
Si nous prions encore…

Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre.
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 

Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre.
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre.
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 
Avec le livre dans une main et la bombe dans l'autre. 

Nous avons un livre, une religion.
Nous avons le feu, nous avons raison.
Nous serons plus grands, nous serons plus unis,
Nous serons plus forts que celui qui nous a meurtris…


LA BOMBE DANS L'AUTRE 
LA BOMBE DANS L'AUTRE 

mercredi 17 juin 2015

ET POURTANT ELLE TOURNE

ET POURTANT ELLE TOURNE




Version française – ET POURTANT ELLE TOURNE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Eppur si muove – Carmen Consoli – 2002




Coupable d'avoir osé
Ce coup de dent à cette pomme
Sacrée 




Regarde, Lucien l'âne mon ami, une chanson de libération, une chanson écrite par une femme, Carmen Consoli, une chanson qui agit comme un philtre libératoire…


Un philtre libératoire, une sorte de purgation, veux-tu dire ? Mais de quoi ?


Mais bien évidemment de cette écrasante atmosphère, de cet étouffant environnement que l'on ressent en Italie où l'Église se répand partout, où s'inhalent des senteurs de catholicité, où s'exhalent par tous les pores du pays des relents de cléricalisme. Et que la chanson soit écrite et interprétée par une Sicilienne est encore plus remarquable. Et de surcroît, ce n'est pas une chanson ancienne… Ce qui montre bien que la chape de plomb divin pèse toujours là-bas presqu'autant que le soleil d'été à midi. Au cœur du dispositif oppressant dont parle la canzone, on trouve l'histoire du péché originel, lequel est une pure invention d'on ne sait quel religieux sadique, qu'on inculque aux humains dès leur plus petite enfance.


En somme, on les marque au fer d'une culpabilité dont ils ne sont en rien coupables. Et après, bonne chance pour s'en débarrasser d'autant plus qu'il y a de multiples piqûres de rappel, que de catéchisme en prêches, on rebat sans cesse le clou du péché. Donc, au départ, un lavage de cerveau et ensuite, sans cesse, la menace d'un châtiment éternel… en insistant bien sur la faute primordiale.


C'est bien de cela que parle la chanson et ce dont elle entend libérer les gens. Le grand Galilée lui-même eut le plus grand mal à affronter cette engeance et ne s'en tira que par une feinte soumission. Comme durent le faire des millions d'autres ; comme des millions d'autres doivent le faire encore aujourd'hui. Silence, elle tourne ! Et la chanson est libératoire car elle dit cette chose simple : il suffit de se débarrasser de ce sentiment de culpabilité et l'on peut enfin vivre… Se débarrasser de l'Église, de Dieu et du péché est le premier pas vers la liberté humaine.


Enfin, je me réjouis grandement d’être un âne, car nous les animaux, nous ne subissons pas cette vindicte divine, même si bien évidemment, elle est purement imaginaire et qu'il suffit de ne plus y croire pour y échapper. Mais j'y pense, c'est le moment de ressortir notre antienne : « Noi, non siamo cristiani, siamo somari » (Nous, nous ne sommes pas des chrétiens, nous sommes des bêtes de somme ») et j'ajoute : et heureux de l'être.


Je me rallie entièrement à ce « et heureux de l'être ». Car, je le suis aussi.


Alors, saluons la chanteuse et sa chanson et reprenons notre tâche sempiternelle et tissons le linceul de ce monde rongé par ses sentiments de culpabilité, étouffé par les croyances, écrasé par les religions et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Coupable d'avoir osé
Ce coup de dent à cette pomme
Sacrée et pour avoir contesté
Leur théorie géocentrique.

Et pourtant elle tourne,
Malgré l'inertie imposée,
Leur envahissant obscurantisme,
Et leur répression despotique.
Au fond, il ne reste qu'à effacer
Mes sentiments de culpabilité.
Un grand merci, sans façon,
Une poignée de main, évidemment,
Un au revoir, des félicitations,
Et mes plus respectueux sentiments.

Coupable d'une pensée
Impure jamais confessée,
Pour avoir mis en doute
Les anges et les croisades.

Je me souviens de cette enfant,
Affectée de troubles mentaux graves,
Jugée diabolique cependant
Pour avoir mâché l'hostie.

Au fond, il ne reste qu'à effacer
Mes sentiments de culpabilité.
Un grand merci, sans façon,
Une poignée de main, évidemment,
Un au revoir, des félicitations,
Et mes plus respectueux sentiments. 

mardi 16 juin 2015

TU L'APPELLES DIEU

TU L'APPELLES DIEU


Version française – TU L'APPELLES DIEU – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Tu lo chiami Dio – Bisca 99 Posse – 1995







Seulement, j'ai vu mourir trop de gens 
Au nom du saint-esprit, du fils et du père.


De fait, l'ami Lucien l'âne, il s'agit bien de ça dans cette chanson, mais il y a autre chose qui me paraît plus radical, plus profond aussi et surtout, plus original. D'abord, il y a là deux interlocuteurs et deux Dieux, chacun le sien. Un des interlocuteurs s'en tient au Dieu officiel, celui reconnu par l'Église, estampillé, en quelque sorte, « Made in Vatican » et l'autre interlocuteur, celui qui parle dans la canzone, entretient d'excellentes relations avec son Dieu personnel ; il l'appelle : « Mon Dieu à moi ». Et ainsi avance la canzone, en alternant « Ton Dieu » et « Mon Dieu à moi ».


Là, je ne suis pas bien. Il y aurait donc deux sortes de Dieux ?


Exactement et ils sont très différents ces deux Dieux. L'officiel, c'est un Dieu imposé, évanescent et théorique ; il niche dans le ciel ; c'est un Dieu imposant, une marionnette gigantesque aux mains de l'Église, une sorte d'épouvantail dont elle use pour apeurer les gens, pour justifier les massacres et les croisades, pour assurer sa domination sur l'humaine nation. En somme, c'est le Dieu de la Guerre de Cent Mille Ans [[7951]] que les riches font aux pauvres pour accroître leurs richesses, renforcer leurs privilèges, perpétuer l'exploitation… En plus, il est inaccessible, planqué là-haut dans son ciel de pacotille.


Celui-là, je le connais, c'est un ectoplasme et puis, il a déjà fait tant de dégâts, tant de malheur, c'est un Dieu destructeur, c'est un grand dictateur ; il a déjà tellement servi qu'il est usé de tous les côtés ; il s'effrite. Mais l'autre dont parle la canzone, quel est-il ? Que fait-il ?


L'autre est un Dieu personnel, concret, vivant et un agréable compagnon de vie, qui se tient dans la panse humaine et se laisse caresser. Je te cite la canzone :

« Mon Dieu à moi ne vit pas au ciel, il ne sait pas voler.
Quand j'ai besoin de lui, il ne me faut pas prier.
Il ne divise pas les eaux, il ne multiplie pas les pains.
Mon Dieu à moi, c'est ma panse et je la caresse avec mes mains. »

En somme, il veille au bien-être quotidien de la personne. Être à soi-même son propre Dieu, voilà qui plaît à l'âne. Un Dieu qui ne pousse ni à l'intolérance, ni à l'inquisition, ni à la croisade, ni à rien, ni à se soumettre à une foi, à une église, à une religion, car pour lui se soumettre, ce serait cesser d'exister.


Voilà un Dieu comme je les aime, dit Lucien l'âne en brayant de satisfaction, car pour l'âne, ce Dieu sera à l'image de l'âne, pour la femme, à l'image de la femme, pour l'hirondelle, il lui poussera des ailes… Un tel Dieu est bien utile, ce n'est plus un seulement Dieu du ciel, c'est un alter-ego réel et allant ainsi à deux, à condition de bien s'aimer soi-même et donc l'aimer aussi, on ne s'ennuie pas dans la vie.


De fait, avec un tel Dieu, on n'est jamais seul et il vous suit partout ; un ami fidèle et discret qui mourra de votre mort. Dès lors, vu ainsi, un Dieu est acceptable et regarde bien où la logique conduit : un tel Dieu ne peut être qu'athée, condition sine qua non de sa propre existence au sein de son empire ventral. Je me demande même si ce Dieu intestinal ne se résoudrait pas finalement dans une ultime bactérie… ou dans l'interaction confuse et entropique de ces milliards d'êtres grouillant dans la panse.


Restons-en là, dit Lucien l'âne et reprenons notre tâche ; tissons le linceul de ce vieux monde croyant, dominateur, dogmatique, religieux et cacochyme.



Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Tu l'appelles Dieu mais moi, je ne le connais pas
Je le trouve un peu louche et de mes amis, il n'est pas
Dieu doit être important car en lui est concentré
Le sens sacré de l'empire créé

Dieu doit être important mais attention attention,
Je ne discuterai pas de Dieu avec celui qui prône une religion.
Tu l'appelles Dieu, mais moi, je ne le connais pas
Il vit au ciel ton Dieu et nous sommes ici-bas.

Ses contradictions, mon Dieu à moi ne les justifie pas
Il ne renvoie pas à demain, il s'engage et se bat,
Il ne doit pas incarner mes aspirations ;
Il mange avec moi, nous avançons à tâtons.

Seulement, j'ai vu mourir trop de gens
Au nom du saint-esprit, du fils et du père.
Mille générations tourmentées par le doute,
Torturées avec calcul, c'est dément, c'est dément.

J'ai vu des femmes en des combats inhumains,
Violées dans leur intimité et traitées de putains.
Mille générations plongées dans le doute et les tourments,
Torturées avec calcul, c'est dément, c'est dément

J'ai vu des vies détruites dans le sourire d'un prêtre
Qui parlait de foi, calme et rassurant.
Mille générations, c'est dément, c'est dément
Et lui sourit calme dans son cloître

Tu l'appelles Dieu mais moi, je ne le connais pas.
Ma spiritualité ne s'exprime pas au travers du culte ; 
Mon Dieu à moi ne vit pas au ciel, il ne sait pas voler. 
Quand j'ai besoin de luiil ne me faut pas prier.
Il ne divise pas les eaux, il ne multiplie pas les pains.
Mon Dieu à moi, c'est ma panse et je la caresse avec mes mains.

MAIS À STALINGRAD : NON !


MAIS À STALINGRAD : NON !


Version française – MAIS À STALINGRAD : NON ! A – Marco Valdo M.I. – 2015

Chanson italienne – Ma a Stalingrado no ! – Yo Yo Mundi – 2005

Tu es le berger des âmes...


15 janvier 1945 : 13 partisans de la Brigade Tom de Casale Monferrato sont assassinés. 15 janvier 2005, à soixante ans de distance, « Yo Yo Mundi » sur la loge du théâtre du XVIIIe siècle de Casale donnent vie, avec d'autres musiciens et des voix de Fabrizio Pagella et de Giuseppe Cederna, en un récital-concert, justement à cette histoire,
13 partisans, 13 musiciens sur la 
scène, étranges coïncidences !
« Résistance », un double cd, précieux témoignage audio et 
vidéo de comment pour « Yo yo mundi » la musique toujours été et doit continuer à être : un véhicule de culture, de mémoires, de souvenirs, d'histoires et de poésie.

« Merci, maintenant et toujours, à tous les hommes et les femmes qui ont vécu ces années de lutte et d'espoir et qui ont lutté – au prix de leur vie – pour libérer l'Italie du fascisme et des nazis. Merci à tous ceux qui continuent à lutter pour les mêmes idéaux contre les nouveaux fascismes ». Ainsi lit-on dans les premières pages du petit livret très soigné, pendant que du lecteur cd commencent à se répandre les premières notes du concert, qui s'ouvre sur un fragment de la poésie « Partigia » de Primo Levi.
L'une après l'autre, les plages du cd se laissent écouter sans nul besoin de commentaires, parce que chaque mot pourrait sembler inutilement et irrémédiablement déplacé.

La musique de Yo Yo Mundi voyage en équilibre instable entre la chanson d'auteur et les ambiances liées à la musique populaire et acoustique faite d'accordéons, guitares, violons et percussions. Parmi les morceaux plus beaux du cd, on remarquera « Eurialo et Niso » ballade écrite par Massimo Bubola, « Brigade Partisane Alphaville », et « Le dernier témoin ». À signaler en outre « Mais à Stalingrad non ! » fragment, inséré dans le concert, tiré d'un vieux vinyle des « Lettres de Stalingrad » avec la voix d'Arnoldo Foà, et enfin une nouvelle version, presque rock de « Bella ciao ».


Lettre de Stalingrad


Tu es le berger des âmes, père, et dans l'ultime lettre, on dit seulement la vérité, ou bien ce qu'on considère vrai.

J'ai cherché Dieu dans chaque trou, dans chaque maison détruite, dans chaque coin, dans chaque camarade, quand j'étais dans la tranchée, et dans le ciel.

Dieu ne s'est pas montré, quand mon coeur criait après lui.

Les maisons étaient détruites, les camarades étaient trop héroïques ou aussi lâches que moi; sur la terre, ce n'était que faim et homicide et du ciel tombaient les bombes et le feu.

Seul Dieu n'y était pas. Non, père, il n'y a aucun Dieu.

Je l'écris à nouveau, et je sais que c'est une chose terrible et pour moi irréparable. Et si vraiment il doit y avoir un Dieu, c'est seulement chez vous, dans vos livres de psaumes et dans vos prières, dans les pieux mots des prêtres et des bergers, dans le son des cloches et dans le parfum de l'encens.

Mais à Stalingrad, non !