lundi 11 août 2014

L'ÉCOLE ET L'ÉTAT




L'ÉCOLE ET L'ÉTAT



UAAR - RENZI ET L' ÉCOLE : ANNONCES PUBLIQUES ET VICES PRIVÉS

              (extr. de "La Page des Blogs" de "MicroMega") 9 juillet 2014

http://blog-micromega.blogautore.espresso.repubblica.it/2014/07/09/uaar-renzi-e-la-scuola-annunci-pubblici-e-vizi-privati/http://asinonuovo.blogspot.com/2014/08/lecole-et-letat.html


Un des amis d'Albi (Action laïque Belgo-italienne) a eu la bonne idée de traduire le blog-édito de l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes, publié dans la revue Micro-Mega.
L'Asino nuovo relaie ces éditos laïques en provenance d'Italie, traduits par Pierre Steenhout.


Dans les premiers pas de l'âne ressuscité, il y avait une traduction du discours de Piero Calamandrei sur l'école publique et les dangers et la stupidité pour une nation, pour un État, de subventionner une école privée – qu'on l'appelle libre ou catholique, n'y change strictement rien.
L’enseignement et l'éducation est un fait de société, un instrument public pour former la base commune d'une collectivité, et dès lors, est une nécessité sociale, forcément indépendante des convictions privées. Il y a donc une absurdité – en tous cas – dans ce domaine à détourner les fonds publics vers des entités privées et pire encore, un tel détournement est une nuisance en termes de construction d'une société dont tous les membres ont les mêmes droits et devraient disposer de fondements communs – le reste venant en dehors dans la sphère privée.
En laissant se développer un enseignement privé et a fortiori en détournant les fonds publics – si nécessaires à l'enseignement commun – au profit d'un réseau privé non seulement, on provoque un immense gaspillage d'argent et d'énergie, mais en plus, on casse toute possibilité de créer un socle commun sur lequel fonder le consensus social minimal.
Les promoteurs d'un enseignement catholique prétendent qu'il y a une façon catholique de voir le monde et de l'enseigner... Un peu comme s'il y avait une « langue catholique » différente de la langue du reste de la société – ce fut d'ailleurs le cas du latin, mais la tentative a failli. Certes, on peut accepter cette hypothèse d'une manière catholique de penser, de dire et d'enseigner ; mais précisément, c'est bien là le problème... Qu'il y ait une vision catholique des choses, soit. Mais elle ne saurait prendre le pas la conception commune d'une société humaine qui – elle – n'est pas « a priori » catholique. Sauf à recréer une théocratie ou une « papocratie »... Ce qui est peut-être le but final de l'Église et qui certainement, l'a été.

On me dira et je le sais que l'Italie, alias Catholand, Catholie... n'est pas la seule dans le cas. Que d'autres pays en Europe et dans le monde... Fort bien, c'est même la raison pour laquelle l'âne porte tant d'attention à ce qui se passe là-bas en Italie. Pour le reste, Dieu reconnaît les siens... Nous aussi. Donc, mutatis mutandis, ce qui se dira ici de l'Italie sous domination catholique vaudra pour d'autres pays, États, nations, communautés... sous domination catholique ou sous la domination de quelque autre religion que ce soit. Là aussi, chacun se reconnaîtra.
Voici donc l'Asino dans la position de Montesquieu, lequel écrivit des Lettres Persanes afin de parler de la France - notamment.

Tout ça pour introduire et commenter l'éditorial de Raffaele Carcano, secrétaire de l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes (UAAR) d'Italie, publié dans le blog UAAR sur l'excellente revue italienne Micro-Mega (avec un titre pareil, on ne saurait exclure un certain tempérament voltairien...)




UAAR - Renzi et l' école : annonces publiques et vices privés


Après Berlusconi, Alfano a lui aussi ouvert la voie à une loi qui reconnaît les unions civiles entre gays. Une confirmation que le climat a changé : être "clérical" n'est plus à la mode, cela ne se porte plus. Le changement porte, cependant, en soi, un effet collatéral non désiré : la privatisation du cléricalisme. On continue à cultiver le vice dans l'ombre, avec l'avantage - ce n'est pas récent - qu'il n'est plus avoué. On le cultive avec son confesseur.

J'ai envie de le penser, quand je lis certaines nouvelles de ces derniers jours. Grande importance donnée au projet de constructions scolaires, voulu par Renzi. Annonces ronflantes : on dépensera plus d'un milliard pour effectuer des travaux dans une école sur deux. Les travaux ont été, avec beaucoup d'imagination, répartis en trois catégories : "écoles neuves" - "écoles sûres" - "écoles belles". Tout cela est bien beau, en effet. Il semble qu'il y ait même une couverture financière.

Entre-temps, toutefois, le gouvernement a, étrangement, oublié (nonobstant des paroles rassurantes) la possibilité d'obtenir le "Huit pour Mille", qui est de la compétence de l'État. La date limite, pour les Municipalités, pour présenter les demandes, est le 30 septembre, mais le règlement n'est pas encore sorti, et aucune publicité n'a été faite au sujet de la possibilité d'en utiliser une partie pour les constructions scolaires, comme l' UAAR l'a demandé. Le temps des déclarations de revenus est passé, désormais, pour tout le monde : une occasion gâchée. C'est tout à l'avantage des choix en faveur de l’Église catholique, "rivale de l’État, avec laquelle l’État ne veut pas rivaliser.

De son côté, le 26 juin, le Ministère de l’Économie et des Finances a promulgué un décret par lequel il dispense, dans les faits, les écoles catholiques du payement de l' IMU (Impôt Municipal sur l'Immobilier) et de la TASI (Nouvelle Taxe sur les Services Municipaux). Ce n'est pas écrit explicitement, cela passerait mal. On a caché entre les "plis" du règlement, le fait que pour faire profiter de l'exemption, on a introduit un seuil de "frais de scolarité" par tête, à ne pas dépasser. Et qui ne sera pas dépassé :   à part celles pour les enfants de VIP qui apprécient qu'on leur fasse payer des frais monstrueux, une grande partie des autres écoles privées (pour deux tiers, des catholiques) se situent en dessous. Et le petit nombre qui ne s'y trouve pas les baisseront juste sous la barre. L'une ou l'autre les relèveront à peu près jusqu' à la barre. Le jeu en vaut la chandelle allumée pour saint Mathieu.

Un règlement non approuvé, oublié de tous, un nouveau règlement obscur caché à beaucoup. Ils ont honte de leurs vices privés, et ils font tout pour les dissimuler. La ministre de l' Instruction (qui, désormais, n'est plus "publique"), Stefania Giannini, ne se comporte pas différemment. Qui a adopté une variante : faire passer son propre vice pour une vertu différente. Le problème est qu'il est difficile, vraiment difficile, de confondre un ivrogne avec un sommelier. La ministre, abandonnée par les électeurs, erre, comme une âme en peine, dans les sept églises, ou plutôt dans les sept "mass media" catholiques (Radio Vaticana, Tv 2000, Tempi...), répétant que "l' école privée fait épargner, à l’État, six milliards, chaque année. Simple amplification de la vulgate catholique, qui ne tient pas debout et, même, a été déjà démentie par la "Fondation Agnelli".

Dans le livre "Sa Sainteté", Gianluigi Nuzzi a révélé les relations secrètes entre le gouvernement Berlusconi et les sommets de sa hiérarchie (celle de l'Église catholique, évidemment - ndr), pour ne pas faire payer l' ICI (Taxe sur les biens immeubles) à l’Église. Les gouvernements changent, les papes changent, même les taxes changent, mais la musique reste toujours la même : le Pantalon paie, la Soutane non. Les hiérarchies ecclésiastiques semblent disposées à tolérer n'importe quelle loi désagréable, mais elles ne veulent, en aucune façon, renoncer à délester de plusieurs milliards, chaque année, les caisses publiques épuisées. Pour les évêques, il ne reste que peu de valeurs non négociables : les valeurs mobilières.


Raffaele Carcano, secrétaire de l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes

(9 juillet 2014)
N° 5

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