mardi 9 février 2016

CHARLES MARTEL RETOUR DE LA BATAILLE DE POITIERS

CHARLES MARTEL RETOUR DE LA 

BATAILLE DE POITIERS

Version française – Charles Martel de retour de la bataille de Poitiers – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – Carlo Martello torna dalla battaglia di Poitiers – Fabrizio De André - 1962









Riccardo Venturi avait fait une version de cette chanson dans un « françois d’époque », enfin disons, une manière de grommelot amélioré ; c’est une version très amusante. Celle, ici proposée, est plus contemporaine ; j’ose l’espérer assez distrayante.

On a tous dans l’oreille la chanson du Roi Renaud et de son lugubre destin : « Le Roi Renaud de guerre s’en revînt portant ses tripes dans ses mains… ». J’aime à penser que Fabrizio connaissait ce destin du pauvre Renaud ; un destin de roi. Ceci donne tout le sel à sa chanson « Charles Martel de retour de la bataille de Poitiers », car – ainsi qu’on le verra – Charles revînt vainqueur en portant tout autre chose que ses tripes dans ses mains. La donzelle l’apprit à ses dépens. De première part, en étant contrainte de laisser Charles et son fameux marteau honorer sa (disons) pudeur, à moins que ce ne fut son (disons) postérieur ; de seconde part, en voyant l’ignoble séducteur s’enfuir sans honorer sa dette.
Mais il y a quand même une justice dans ce monde, il y a quand même une morale dans la chanson : le roi penaud s’en alla finir sa guerre dans les taillis – cul par-dessus tête – c’était bien son tour.
Voilà une vision moins glorieuse de Charles et de son marteau, duquel on nous a tant rebattu les oreilles et cassé nos enfantines roubignoles en de grands élans européoxénophobes.
Rappelez-vous, en ces temps-là, on enfonçait la chrétienté dans nos têtes à coups de marteau… Le fait-on encore aujourd’hui ? C’est à craindre.

Cela dit, ne vous mettez pas martel en tête avec tout ça, voilà une chanson revigorante et rabelaisienne, dont tout un chacun se réjouira hautement.


Ainsi Parlait Marco Valdo M.I.









Le Roi Charles de guerre s’en revînt.
Fut accueilli sur ses terres d’une couronne de laurier.
Au chaud soleil du printemps angevin,
Scintille l’armure du vainqueur de Poitiers.



Le sang du Prince, le sang du Maure
Arrosent le cimier de mêmes atours,
Mais plus que des blessures corporelles,
Charles ressent les affres de l’amour.



« Si la guerre étanche chez le vainqueur
La passion de la gloire et la soif d’honneur,
Elle ne te concède pas un moment pour faire l’amour.
Celui qui impose la ceinture de chasteté
À sa suave épouse, commet un geste bien lourd
Et court le risque à la bataille d’en perdre la clé. »



Ainsi se lamentait ce roi chrétien.
Le blé s’incline, les fleurs le décorent.
Le miroir de la fontaine d’étain
Reflète le fier vainqueur des Mores.



Quand voici que dans l’eau débonde,
Admirable vision, le symbole de l’amour.
Au cœur de longues tresses blondes
Paraît en plein soleil son sein nu.



« Je n’ai jamais vu chose plus belle
Jamais je ne vis si jolie pucelle »,
dit le roi en descendant rapidement de selle.
« Hé, chevalier, ne vous approchez pas,
D’autres déjà ont joui de celle-là,
À d’autres fontaines plus faciles, apaisez votre émoi. »



Surpris de mots si décidés,
Charles s’arrêta en s’entendant ainsi moqué.
Mais le jeûne pèse plus que l’honneur,
Tout tremblant le roi offrit son cœur.



C’était là le répertoire caché
Dont usait Charles dans les grandes difficultés.
À la dame, il montra un grand nez
Un visage de bouc, mais c’était Sa Majesté.



« Si vous n’étiez mon souverain ».
Charles dégagea sa grande rapière.
« Je ne cèlerais pas mon désir de fuir au loin,
Mais puisque vous êtes mon seigneur »
Charles relève sa bannière.
« Je dois vous concéder toute ma pudeur ».



C’était un cavalier des plus vaillants,
Dans cette passe d’honneur, il se redressa
Et arrivé à l’acmé tout fringant,
Il tenta de remonter encore une fois.



Rapide, la pucelle le harponna
Et présenta ses honoraires à son seigneur :
« C’est bon que vous êtes le roi,
Cinquante mille, c’est un prix de faveur. »



« C’est pas Dieu possible, nom d’un chien,
Qu’en ce royaume, toutes les aventures
Se déroulent avec de grandes putains !
Même sur le prix, il y a à redire. Pour sûr,
Je me souviens très bien qu’avant mon départ,
Les tarifs étaient inférieurs à trente mille patards ».



Cela dit, comme un grand saligaud,
D’un bond de lion, en selle, il sauta.
Fouettant son cheval comme un bourricot,
Dans les glycines et le sureau, le roi s’étala.



Le Roi Charles de guerre s’en revenant
Fut accueilli sur ses terres d’une couronne de laurier.
Au soleil d’un chaud printemps
Scintille l’armure du vainqueur de Poitiers.

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