ATHÉISME
ET BESOIN DE RITUALITÉ
Version
française des Dernières Nouvelles de l'UAAR – Union des Athées,
Agnostiques et Rationalistes. (16 janvier 2014) :
Le grand sapin |
Précepte
laïque
Italiens,
encore un effort pour devenir laïques !
Dans
son édition du 16 janvier 2014, l'UAAR reprend un article de Paul
Fidalgo, publié sur son blog Friendly
Atheist, intitulé “Atheism
and the Need for ‘Sacred Spaces’ for Ritual: Are They in
Conflict?”
et
partant de là, s'interroge à son tour sur le besoin de rites chez
les athées. On verra la traduction de cet article de l'UAAR
ci-dessous. Mais avant, il importe de poser la question en termes
rationnels afin de neutraliser certaines dérives « étazuniennes »,
qui pour noyer le poisson et assurer le consensualisme sociétal
(alias le politiquement correct), de rigueur dans la bonne société
d'outre-Atlantique, lancent l'anathème contre le « nouvel
athéisme » et contre les « athées ultra-orthodoxes »,
c'est-à-dire en clair, contre les athées tout court. Le but
essentiel étant de les disqualifier par avance ; en somme, de
les excommunier. Pour un peu, on en viendrait à traiter les athées
athées – je veux dire réellement athées – d'hérétiques.
Bref, on voit poindre ici une guerre de religions entre « athées »,
une croisade contre les « athées » plus ou moins
orthodoxes, plus ou moins labellisés. À quand les bûchers ? À
quand l'Inquisition ?
Comme
on le verra, tout ça au nom de l' « esthétique » ?
On croit rêver...
Alors,
un moment de réflexion.
Il
y a une confusion dans les idées qui tend à assimiler athéisme et
laïcité.
Et
ce brouillard, comme tous les brouillards qui se respectent, perturbe
assez la vision et dès lors, favorise une sorte de magma où les
lignes et les pensées se perdent.
En
premier lieu, il faudrait comparer ce qui est comparable : non
pas l'athéisme à la laïcité – qui sont des concepts qui se
situent sur des plans différents. L'athéisme renvoie à une
conception philosophique et la laïcité à un comportement social en
même temps qu'au groupe et aux institutions qui s'en réclament.
Il
faudrait donc mettre face à face : la laïcité et l'athéité.
Deux entités comparables, mais véritablement distinctes.
Par
ailleurs, ces deux mondes particuliers ne couvrent pas l’ensemble
des « mécréants » ; il est une catégorie ignorée
et pourtant centrale et essentielle au mécréantisme, c'est cette
bande qui a comme principe et comme pratique le refus non seulement
de Dieu, non seulement de l'appartenance ou du ralliement à une
religion, mais bien le refus de toute forme de religion, fût-elle
athée. Mécréantisme qui implique non seulement le refus de toute
croyance dogmatique, de toute croyance spirituelle, mais aussi de
toute croyance tout court. Cette attitude de vie entraîne également
le refus de toute organisation structurée fondée sur la reliance
(religio), elle-même fondée sur un substrat commun et des
obédiences communes. Bref, le refus de toute religion entraîne le
refus de toute forme d'église, même laïque. Dès lors, pour en
venir aux rites (précisons que nous ne sommes pas contre la
fête...), on découvre ceci : tout rituel, ayant, c'est sa
nature, pour fonction d'engager et d'assurer l'avenir, d'affirmer et
de garantir la soumission, est, par essence, une forme de sortilège
ou de superstition et repose sur une croyance (peu importe laquelle);
il l'institue. Pour le mécréant, le refus de tout rituel est
évidemment cardinal – il s'impose.
Conclusion
provisoire : Comme on peut être à la fois athée, laïque et
religieux, je ne sais donc pas si l'athéïté, la laïcité ont
besoin de rites... Mais ce que je sais, c'est que le mécréantisme
au sens strict, dans son acception la plus profonde, qui est lui-même
a minima athée ou indifférent à l'existence de dieux, et laïque,
ce mécréantisme y est franchement opposé et estime que
l'indépendance, la dignité et la liberté humaine passent par la
disparition des religions.
Athéïsme
et besoin de ritualité.
(texte
traduit de l'UAAR)
Suzanne Moore a écrit dans
le Guardian à propos du processus mental qui l'a poussée à
réaliser une sorte de cérémonie pour la naissance de son troisième
enfant (congratulations, au passage !). En faisant cela, elle a
découvert que son désir pour une forme de rituel qui célébrait
l'événement entrait en conflit avec son désir d'être une « bonne
athée ».
Voilà comme elle-même explique
le problème : elle craint que le « nouvel athéisme »,
quelle que soit l'interprétation du terme, puisse « se fixer
sur l'éthique en ignorant l'esthétique » et que « l'athéisme
ultraorthodoxe commence à ressembler lui-même à une foi rigide et
patriarcale ».
Personnellement l'idée-même d'un
« athéisme ultraorthodoxe » me dérange beaucoup, et
j'imagine que beaucoup parmi vous avez la même réaction,
principalement parce que comme concept, il n'a presque pas lieu
d'être (comment pourrait-il ?). Mais Moore présente des raisons
solides pour réserver un espace assimilable au « sacré »
pour marquer les événements importants de la vie.
Nous avons la nécessité de créer
un espace hors de la vie quotidienne dans ce but. Nous pouvons
l'appeler espace sacré, si nous voulons, mais la délimitation
d'espaces ou les instants spéciaux n'est pas exclusivement une
prérogative des religieux. Nous pouvons vivre sans Dieu. Nous
pouvons considérer sans fondement et inconsistante la pensée new
age qu'il rend emphatique la « nature » et l'« esprit »,
mais considérer stupide le besoin humain d'exprimer transcendance et
partage avec d'autres est à son tour stupide.
J'ai vu des cérémonies
unitariennes pour nouveaux-nés (et même moins « nouveaux »),
dépourvues de lourds traits religieux, et je les ai trouvées
pleines de signification ; une manière tendre de donner le bienvenu
à un nouvel être humain de la part d'une communauté de personnes
bienveillantes. Elles n'offensaient pas mon athéisme.
Ceci est cependant un motif de
cassure entre les mécréants, portant sur le fait que les cérémonies
puissent trouver place à l'intérieur de notre mouvement, de notre
communauté. Certains croient fermement que oui : vu par exemple le
succès des « Sunday Assembly » (Assemblées du dimanche)
et le travail des Harvard Humanists [à l'université de Harvard il y
a un chapelain humaniste]. D'autres repoussent tout type de
« congrégationnalisme », comme par exemple Tom Flynn, un
de mes chefs au Center For Inquiry (CFI). Les raisons peuvent être
de caractère générationnel ou bien personnel.
Pour cette raison CFI de Los
Angeles, a organisé le 5 janvier une conférence sur la ritualité,
pas pour la naissance mais à l'opposé, pour le départ. Dans cette
rencontre, Caitlin Doughty a parlé des rituels de fin de vie
destinés aux personnes laïques. En tout cas, qu'on parle de mort,
de naissance, de mariage ou de rencontres dominicales, nous cherchons
tous à comprendre si et comment insérer des rituels et des
cérémonies dans la vie des athées.
La
rédaction
Même l'Uaar organise, pour qui le
désire (et seulement pour qui le désire), des cérémonies
laïques-humanistes.
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