La Mort de Claes, le charbonnier
Chanson française – La Mort de Claes, le charbonnier – Marco Valdo M.I. – 2015
Ulenspiegel le Gueux – 19
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – I, LXXIV)
Cette numérotation particulière : (Ulenspiegel – I, I), signifie très exactement ceci :
Ulenspiegel : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs, dans le texte de l’édition de 1867.
Le premier chiffre romain correspond au numéro du Livre – le roman comporte 5 livres et le deuxième chiffre romain renvoie au chapitre d’où a été tirée la chanson. Ainsi, on peut – si le cœur vous en dit – retrouver le texte originel et plein de détails qui ne figurent pas ici.
Ulenspiegel le Gueux – 19
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – I, LXXIV)
Cette numérotation particulière : (Ulenspiegel – I, I), signifie très exactement ceci :
Ulenspiegel : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs, dans le texte de l’édition de 1867.
Le premier chiffre romain correspond au numéro du Livre – le roman comporte 5 livres et le deuxième chiffre romain renvoie au chapitre d’où a été tirée la chanson. Ainsi, on peut – si le cœur vous en dit – retrouver le texte originel et plein de détails qui ne figurent pas ici.
La flamme monte longue, étroitement
Et le cri fend l’air et le vent.
La flamme monte longue, étroitement
Et le cri fend l’air et le vent.
Nous voici, Lucien l’âne mon ami, à la dix-neuvième canzone de l’histoire de Till le Gueux. Les dix-huit premières étaient, je te le rappelle :
Nous voici, Lucien l’âne mon ami, à la dix-neuvième canzone de l’histoire de Till le Gueux. Les dix-huit premières étaient, je te le rappelle :
01 Katheline la bonne sorcière [[50627]] (Ulenspiegel – I, I)
02 Till et Philippe [[50640]](Ulenspiegel – (Ulenspiegel – I, V)
03. La Guenon Hérétique [[50656]](Ulenspiegel – I, XXII)
04. Gand, la Dame [[50666]](Ulenspiegel – I, XXVIII)
05. Coupez les pieds ! [[50687]](Ulenspiegel – I, XXX)
06. Exil de Till [[50704]](Ulenspiegel – I, XXXII)
07. En ce temps-là, Till [[50772]](Ulenspiegel – I, XXXIV)
08. Katheline suppliciée [[50801]](Ulenspiegel – I, XXXVIII)
09. Till, le roi Philippe et l’âne [[50826]](Ulenspiegel – I, XXXIX)
10. La Cigogne et la Prostituée [[50862]](Ulenspiegel – I, LI)
12. La messe du Pape, le pardon de Till et les florins de l’Hôtesse [[50939]](Ulenspiegel – I, LIII)
13. Indulgence [[51015]] (Ulenspiegel – I, LIV)
14. Jef, l’âne du diable [[51076]] (Ulenspiegel – I, LVII)
15. Vois-tu jusque Bruxelles ? [[51124]] (Ulenspiegel – I, LVIII)
16. Lamentation de Nelle, la mule et la résurrection [[51150]] (Ulenspiegel – I, LXVIII)
17. Hérétique le Bonhomme [[51196]] (Ulenspiegel – I, LXIX)
18. Procès et condamnation [[51215]] (Ulenspiegel – I, LXIX)
Vois, Lucien l’âne mon ami, je t’apporte une chanson terrible ; elle conte une histoire horrifiante ; celle de la mort de Claes, le charbonnier, que l’on fait brûler, car l’Inquisition l’a fait condamner au bûcher. C’était là, tu t’en souviens certainement, le récit de la chanson précédente de ce cycle de Till le Gueux : Procès et condamnation.
Oui, je me souviens très bien de cette canzone au titre construit sur le juron : « Enfer et damnation » et ce procès m’avait glacé les poils et les os de la pointe des oreilles au bout de la queue, sans oublier de descendre jusqu’à mes noirs sabots.
Alors, sans plus attendre, je te laisse découvrir cette scène atroce au travers de cette nouvelle chanson. Elle est assez réaliste, mais comme qui dirait, elle raconte cette exécution publique avec une sorte de pudeur, avec une distance de bon aloi. Bref, elle ne fait pas dans le sensationnel, ce qui aurait été à l’encontre du sentiment du peuple venu assister, laissant percer sa rage impuissante, Claes dans son dernier sursaut. Le populaire, comme l’appelle Charles De Coster, est furieux – la canzone dit « colère » – contre cette exécution et il n’a rien à voir avec certains publics d’exécutions capitales enthousiastement sadiques. Il est venu par compassion – pour partager la passion de Claes, pour lui tenir la main dans l’épreuve, à défaut de pouvoir le sauver du supplice.
Je suis heureux de l’entendre, dit Lucien l’âne, car ceux qui tirent jouissance du malheur des autres me répugnent au plus haut point.
Donc, la chanson n’offre pas prise au sensationnel, qui était pourtant un écueil prévisible ; ni dans le compassé, l’éteint, ce qui en était un autre. Cependant, dans sa première version, telle que je l’avais établie directement en partant du texte de Charles De Coster, elle sonnait faux, elle ne rendait pas le bon son et même si je percevais fort bien ce défaut, je ne comprenais pas d’où venait cette sensation.
Cela arrive souvent, dit Lucien l’âne, et il n’est pas toujours facile d’en voir le pourquoi et ni de savoir comment faire pour la faire disparaître.
C’est exactement là que j’en étais après avoir imprimé cette version première et je me demandais ce qui clochait – tu verras combien ce verbe est approprié. Puis d’un coup, la solution m’a sauté aux yeux. Je vais la formuler de façon générale : pour qu’un récit devienne une action, il faut le mettre au temps présent. Et suivant en cela le conteur De Coster, j’étais resté à raconter au passé.
C’est, en effet, le temps des contes, Dit Lucien l’âne en fronçant l’œil.
Dès que j’ai eu mis les verbes au présent, ma chanson est entrée dans le monde de l’action. Un peu comme l’on passe de l’image fixe à l’image animée, de la peinture ancienne au cinéma. Évidemment, on sait bien que l’événement est passé et que c’est là pure mise en scène. Mais la sensation est beaucoup plus forte et dans ce cas-ci, c’était ce qu’il fallait produire. Le temps de la réflexion (du reflet) vient seulement ensuite.
En l’occurrence, dit Lucien l’âne, ce temps second est aussi celui de l’indignation et de la condamnation. Oh, pas la condamnation du bourreau, ce lampiste, simple exécutant de ce que lui impose comme tâche la société, mais celle des juges obéissant à l’ordre et surtout, de l’Inquisition, la mauvaise fée du monde de Till. Le juge, selon nous les ânes, n’est pas là pour servir le pouvoir et les règles qu’il édicte, mais bien pour établir la justice. Le juge aussi doit faire usage de la liberté de conscience que son état d’être humain lui impose. Il ne peut pas se réfugier derrière son rôle d’exécutant, car il est complice du pouvoir.
Oh, Lucien l’âne, voilà un grand débat et qui nous emmènerait bien loin si on se mettait en tête de le mener ici. Mais sur le fond, les ânes ont parfaitement raison. Même si certains font un mauvais usage de la liberté de conscience en en faisant un prétexte pour finalement se soumettre à un dogme émanant d’une puissance supérieure. Il est indigne de l’humaine condition de détourner la liberté et son usage au profit d’une entité qui se veut et se prétend supérieure à elle.
Tu as raison, Marco Valdo M.I., ces gens-là sont indignes, mais restons-en là. Reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde à l’ordre, aux ordres, discipliné, dogmatique et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
La mère et le fils s’en vont
Voir le père en sa dernière prison.
Le roi hérite des biens des martyrs
Et moi, dit Claes, je vais tantôt partir.
Fils, pèlerin courant les grands chemins
Traînant en route comme un mauvais garçon,
Ne laisse pas ta mère seule face au destin.
Tu lui dois défense et protection.
Pendant le supplice, les voisins et les voisines
Enferment enfants et femme.
Tous entendent les cris, tous voient la flamme.
« Faites un trou, l’âme veut sortir », dit Katheline.
Les bourreaux empilent les fagots et le bois,
Le peuple colère gronde d’une seule voix,
Claes attend la suite posément,
Les cloches des morts égrènent leur chant.
La fumée, la fumée du bûcher
Au nom des Dieux père, fils et saint-esprit allumé,
Lèche le corps attaché au poteau.
Till ne veut plus adorer le dieu des bourreaux
On n’entend plus que le bois crépiter
Les hommes gronder, les femmes pleurer
Les cloches battre le martyre.
« Faites un trou, l’âme veut sortir ».
La flamme monte longue, étroitement
Et le cri fend l’air et le vent.
Claes brûle d’immenses douleurs,
Où est le roi, que je lui arrache le cœur ?
Le bûcher consumé s’affaisse ;
Le corps tout noir s’affale.
Un feu de fièvre dévore la veuve ;
Till ne veut plus prier le Dieu du Pape.
01 Katheline la bonne sorcière [[50627]] (Ulenspiegel – I, I)
02 Till et Philippe [[50640]](Ulenspiegel – (Ulenspiegel – I, V)
03. La Guenon Hérétique [[50656]](Ulenspiegel – I, XXII)
04. Gand, la Dame [[50666]](Ulenspiegel – I, XXVIII)
05. Coupez les pieds ! [[50687]](Ulenspiegel – I, XXX)
06. Exil de Till [[50704]](Ulenspiegel – I, XXXII)
07. En ce temps-là, Till [[50772]](Ulenspiegel – I, XXXIV)
08. Katheline suppliciée [[50801]](Ulenspiegel – I, XXXVIII)
09. Till, le roi Philippe et l’âne [[50826]](Ulenspiegel – I, XXXIX)
10. La Cigogne et la Prostituée [[50862]](Ulenspiegel – I, LI)
12. La messe du Pape, le pardon de Till et les florins de l’Hôtesse [[50939]](Ulenspiegel – I, LIII)
13. Indulgence [[51015]] (Ulenspiegel – I, LIV)
14. Jef, l’âne du diable [[51076]] (Ulenspiegel – I, LVII)
15. Vois-tu jusque Bruxelles ? [[51124]] (Ulenspiegel – I, LVIII)
16. Lamentation de Nelle, la mule et la résurrection [[51150]] (Ulenspiegel – I, LXVIII)
17. Hérétique le Bonhomme [[51196]] (Ulenspiegel – I, LXIX)
18. Procès et condamnation [[51215]] (Ulenspiegel – I, LXIX)
Vois, Lucien l’âne mon ami, je t’apporte une chanson terrible ; elle conte une histoire horrifiante ; celle de la mort de Claes, le charbonnier, que l’on fait brûler, car l’Inquisition l’a fait condamner au bûcher. C’était là, tu t’en souviens certainement, le récit de la chanson précédente de ce cycle de Till le Gueux : Procès et condamnation.
Oui, je me souviens très bien de cette canzone au titre construit sur le juron : « Enfer et damnation » et ce procès m’avait glacé les poils et les os de la pointe des oreilles au bout de la queue, sans oublier de descendre jusqu’à mes noirs sabots.
Alors, sans plus attendre, je te laisse découvrir cette scène atroce au travers de cette nouvelle chanson. Elle est assez réaliste, mais comme qui dirait, elle raconte cette exécution publique avec une sorte de pudeur, avec une distance de bon aloi. Bref, elle ne fait pas dans le sensationnel, ce qui aurait été à l’encontre du sentiment du peuple venu assister, laissant percer sa rage impuissante, Claes dans son dernier sursaut. Le populaire, comme l’appelle Charles De Coster, est furieux – la canzone dit « colère » – contre cette exécution et il n’a rien à voir avec certains publics d’exécutions capitales enthousiastement sadiques. Il est venu par compassion – pour partager la passion de Claes, pour lui tenir la main dans l’épreuve, à défaut de pouvoir le sauver du supplice.
Je suis heureux de l’entendre, dit Lucien l’âne, car ceux qui tirent jouissance du malheur des autres me répugnent au plus haut point.
Donc, la chanson n’offre pas prise au sensationnel, qui était pourtant un écueil prévisible ; ni dans le compassé, l’éteint, ce qui en était un autre. Cependant, dans sa première version, telle que je l’avais établie directement en partant du texte de Charles De Coster, elle sonnait faux, elle ne rendait pas le bon son et même si je percevais fort bien ce défaut, je ne comprenais pas d’où venait cette sensation.
Cela arrive souvent, dit Lucien l’âne, et il n’est pas toujours facile d’en voir le pourquoi et ni de savoir comment faire pour la faire disparaître.
C’est exactement là que j’en étais après avoir imprimé cette version première et je me demandais ce qui clochait – tu verras combien ce verbe est approprié. Puis d’un coup, la solution m’a sauté aux yeux. Je vais la formuler de façon générale : pour qu’un récit devienne une action, il faut le mettre au temps présent. Et suivant en cela le conteur De Coster, j’étais resté à raconter au passé.
C’est, en effet, le temps des contes, Dit Lucien l’âne en fronçant l’œil.
Dès que j’ai eu mis les verbes au présent, ma chanson est entrée dans le monde de l’action. Un peu comme l’on passe de l’image fixe à l’image animée, de la peinture ancienne au cinéma. Évidemment, on sait bien que l’événement est passé et que c’est là pure mise en scène. Mais la sensation est beaucoup plus forte et dans ce cas-ci, c’était ce qu’il fallait produire. Le temps de la réflexion (du reflet) vient seulement ensuite.
En l’occurrence, dit Lucien l’âne, ce temps second est aussi celui de l’indignation et de la condamnation. Oh, pas la condamnation du bourreau, ce lampiste, simple exécutant de ce que lui impose comme tâche la société, mais celle des juges obéissant à l’ordre et surtout, de l’Inquisition, la mauvaise fée du monde de Till. Le juge, selon nous les ânes, n’est pas là pour servir le pouvoir et les règles qu’il édicte, mais bien pour établir la justice. Le juge aussi doit faire usage de la liberté de conscience que son état d’être humain lui impose. Il ne peut pas se réfugier derrière son rôle d’exécutant, car il est complice du pouvoir.
Oh, Lucien l’âne, voilà un grand débat et qui nous emmènerait bien loin si on se mettait en tête de le mener ici. Mais sur le fond, les ânes ont parfaitement raison. Même si certains font un mauvais usage de la liberté de conscience en en faisant un prétexte pour finalement se soumettre à un dogme émanant d’une puissance supérieure. Il est indigne de l’humaine condition de détourner la liberté et son usage au profit d’une entité qui se veut et se prétend supérieure à elle.
Tu as raison, Marco Valdo M.I., ces gens-là sont indignes, mais restons-en là. Reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde à l’ordre, aux ordres, discipliné, dogmatique et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
La mère et le fils s’en vont
Voir le père en sa dernière prison.
Le roi hérite des biens des martyrs
Et moi, dit Claes, je vais tantôt partir.
Fils, pèlerin courant les grands chemins
Traînant en route comme un mauvais garçon,
Ne laisse pas ta mère seule face au destin.
Tu lui dois défense et protection.
Pendant le supplice, les voisins et les voisines
Enferment enfants et femme.
Tous entendent les cris, tous voient la flamme.
« Faites un trou, l’âme veut sortir », dit Katheline.
Les bourreaux empilent les fagots et le bois,
Le peuple colère gronde d’une seule voix,
Claes attend la suite posément,
Les cloches des morts égrènent leur chant.
La fumée, la fumée du bûcher
Au nom des Dieux père, fils et saint-esprit allumé,
Lèche le corps attaché au poteau.
Till ne veut plus adorer le dieu des bourreaux
On n’entend plus que le bois crépiter
Les hommes gronder, les femmes pleurer
Les cloches battre le martyre.
« Faites un trou, l’âme veut sortir ».
La flamme monte longue, étroitement
Et le cri fend l’air et le vent.
Claes brûle d’immenses douleurs,
Où est le roi, que je lui arrache le cœur ?
Le bûcher consumé s’affaisse ;
Le corps tout noir s’affale.
Un feu de fièvre dévore la veuve ;
Till ne veut plus prier le Dieu du Pape.
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