mercredi 25 novembre 2015

Brave Margot

Brave Margot

Chanson française – Brave Margot – Georges Brassens – 1952
Paroles et Musique: Georges Brassens – 1952





Patachou, première interprète "Brave Margot" de Georges Brassens. Séquence extraite du film de Jean Boyer, "Femmes de Paris". (1953) : https://www.youtube.com/watch?v=aciD81iRRlU
Version clandestine de Georges Brassens (lui-même) :1954 http://www.dailymotion.com/video/x9yudh_georges-brassens-brave-margot_music
Version jazz : Sidney Bechet : https://www.youtube.com/watch?v=jc6xmQRcTXA
Une italienne : Nanni Svampa « La Contadinella » : https://www.youtube.com/watch?v=jem_m1EAvtI



Elle entrouvre sa collerette
Et le couche contre son sein ;
C’était tout ce qu’elle avait pauvrette
Comme coussin.

Vierge allaitant l'enfant, 1515
Lucas Müller CRANACH





Mon ami Lucien l’âne, il te souviendra que l’autre jour, j’ai inséré ici-même une chanson de ma composition consacrée à Carlo Levi, confiné politique à Aliano en Lucanie et intitulée : Au-delà d’Eboli.
À cette occasion, je t’avais indiqué qu’il s’agissait d’une parodie d’une chanson de Georges Brassens, de Tonton Georges, chanson connue de tous les enfants de France et de Navarre (ou presque) et sans doute bien au-delà, vu qu’il doit bien en exister des versions italienne(s), espagnole(s) et même dans d’autres langues.  


Je me souviens parfaitement de la circonstance et je peux même donner le titre de la chanson qui est « Brave Margot ». Une très jolie chanson… Qui soit dit en passant a dû résonner souvent aux oreilles de la chanteuse italienne homonyme, in arte "Margot", Margherita Galante Garrone, fille de Carlo Galante Garrone, proche de Carlo Levi depuis les débuts de la lutte antifasciste.


En effet, j’imagine que les amis des Cantacronache ont dû lui faire entendre bien des fois cette canzone ; c’étaient des gens plein d’humour ; il suffit de voir l’hymne national qu’ils ont concocté pour les « fratelli d’Italia » … Enfin, je n’y étais pas. Cependant, c’est une très jolie canzone et c’est aussi bien autre chose. C’est une chanson qui, l’air de rien, dénonce la violence faite aux femmes. On va lui tuer son chat à cette jeune bergère parce que les mégères ne supportent pas qu’elle recueille le petit animal contre son sein et que leurs hommes la regarde allaiter. A-t-on idée de pareille barbarie ? On comprend tout de suite que le chat n’est qu’un symbole et qu’en réalité, si on les laissait faire, elles la lapideraient cette jolie fille. J’ai même connaissance de gens qui veulent interdire aux mères d’allaiter en public.


Si ça les dérange, rien ne les empêche de regarder ailleurs ou de fermer les yeux. La pudibonderie est un prétexte pour écraser la beauté qui dérange, pour imposer les interdits religieux ou les obligations religieuses, interdire ou obliger : c’est du pareil au même. Il s’agit de voiler la beauté… Elle pourrait rendre les gens heureux. De André l’avait bien compris qui avait écrit Bouche de Rose (Bocca di Rosa), sorte de variation sur le thème de Margot. C’est aussi une chanson qui dénonce la violence assassine contre les animaux. C’est une chanson qui dénonce le lynchage, le comportement de meute, l’institution de la victime expiatoire, l’enfermement des femmes… Bref, une chanson libertaire, anti-autoritaire et antireligieuse.


Tu as raison, Marco Valdo M.I. mon ami, ces femmes sont folles et méchantes et nous n’avions pas pour rien inséré ici « La Déclaration Universelle des droits de l’âne », dont la première interprétation chantée est la version polonaise de et par Krzysiek Wrona. Qu’il en soit ici remercié et couvert de fleurs de la tête aux pieds. D’ailleurs, Georges Brassens n’en pensait pas moins que ces femmes fussent méchantes de s’en prendre à un chat, lui qui disait dans une autre chanson :
«  Mais que jamais — mort de mon âme,
Jamais, il ne fouette mes chats.

S´il fouette mes chats, il y a un fantôme
Qui viendra le persécuter. »
Et il avait raison, ces femmes mériteraient que le fantôme du lac ou le fantôme de l’oncle Gaétan les poursuive toutes les nuits de leur triste vie.


A-t-on idée de s’en prendre à un chat pour une raison aussi futile et stupide que la jalousie ? Le mieux qu’elles auraient eu à faire eût été de réagir comme Mimie, l’amie de mon ami Fernand…


Et qu’est-ce qu’elle a fait Mimie, l’amie de ton ami Fernand ?, demande Lucien l’âne passablement éberlué.


Eh bien, figure-toi que Mimie laissait Fernand zyeuter tout ce qu’il pouvait (et il pouvait beaucoup) et même des bien plus jeunes qu’elle ; tant qu’il voulait qu’il pouvait zyeuter le Fernand et la Mimie le regardait zyeuter en disant : « Tout ça, c’est de l’avance à l’allumage », comprenez : « Ça stimule Fernand et c’est moi qui en profite, finalement. »


Une femme sage, cette Mimie, l’amie de ton ami Fernand. J’espère que Fernand l’était autant. Enfin, écoutons cette chanson et reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde voyeur, stupide, brutal, lapideur et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.






Margoton la jeune bergère
Trouvant dans l’herbe un petit chat,
Qui venait de perdre sa mère,
L’adopta.
Elle entrouvre sa collerette
Et le couche contre son sein ;
C’était tout ce qu’elle avait pauvrette
Comme coussin.
Le chat la prenant pour sa mère
Se mit à téter tout de go ;
Émue, Margot le laissa faire,
Brave Margot.
Un croquant passant à la ronde
Trouvant le tableau peu commun,
S’en alla le dire à tout le monde
Et le lendemain.

Quand Margot dégrafait son corsage
Pour donner la gougoutte à son chat,
Tous les gars, tous les gars du village
Étaient là, la la la la la la
Étaient là, la la la la la la la
Et Margot, qui était simple et très sage,
Présumait que c’était pour voir son chat
Que tous les gars, tous les gars du village
Étaient là, la la la la la la
Étaient là, la la la la la la la

Le maître d’école et ses potaches,
Le maire, le bedeau, le bougnat
Négligeaient carrément leur tâche
Pour voir ça.
Le facteur d’ordinaire si preste
Pour voir ça, ne distribuait plus
Les lettres que personne au reste
N’aurait lues.
Pour voir ça, Dieu leur pardonne,
Les enfants de chœur au milieu
Du Saint Sacrifice abandonnent
Le saint lieu.
Les gendarmes, même les gendarmes,
Qui sont par nature si ballots
Se laissaient toucher par les charmes
Du joli tableau.

Quand Margot dégrafait son corsage
Pour donner la gougoutte à son chat,
Tous les gars, tous les gars du village
Étaient là, la la la la la la
Étaient là, la la la la la la la
Et Margot, qui était simple et très sage,
Présumait que c’était pour voir son chat
Que tous les gars, tous les gars du village
Étaient là, la la la la la la
Étaient là, la la la la la la la

Mais les autres femmes de la commune,
Privées de leurs époux, de leurs galants,
Accumulèrent la rancune
Patiemment.
Puis un jour, ivres de colère,
Elles s’armèrent de bâtons
Et farouches, elles immolèrent
Le chaton.
La bergère après bien des larmes
Pour se consoler prit un mari
Et ne dévoila plus ses charmes
Que pour lui.
Le temps passa sur les mémoires,
On oublia l’événement.
Seuls des vieux racontent encore
À leurs petits enfants.

Quand Margot dégrafait son corsage
Pour donner la gougoutte à son chat,
Tous les gars, tous les gars du village
Étaient là, la la la la la la
Étaient là, la la la la la la la
Et Margot, qui était simple et très sage,
Présumait que c’était pour voir son chat
Que tous les gars, tous les gars du village
Étaient là, la la la la la la
Étaient là, la la la la la la la

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