LES
PROFESSEURS DE RELIGION AUX
ORDRES...
UAAR
- "Strasbourg confirme : les professeurs de religion sont aux
ordres des évêques"
(extr. de "La Page des Blogs" de "MicroMega") 19 juin 2014
(extr. de "La Page des Blogs" de "MicroMega") 19 juin 2014
http://blog-micromega.blogautore.espresso.repubblica.it/2014/06/19/uaar-strasburgo-conferma-i-docenti-di-religione-sono-agli-ordini-dei-vescovi/
http://asinonuovo.blogspot.be/2014/07/les-professeurs-de-religion-aux-ordres.html
Un
des amis d'Albi (Action laïque Belgo-italienne) a eu la bonne idée
de traduire le blog-édito de l' UAAR - Union des Athées et des
Agnostiques Rationalistes, publié dans la revue Micro-Mega.
L'Asino
nuovo relaie ces éditos laïques en provenance d'Italie, traduits
par Pierre Steenhout.
Ils sont payés par l'État |
Ils
sont payés par l'État. On s'attendrait, pourtant, à ce que l'État
ait "voix au chapitre" en matière d' engagement et de
licenciement des professeurs de religion catholique, mais ce n'est
pas le cas : les décisions reviennent exclusivement aux évêques,
et l'État ne doit pas y fourrer son nez. C'est la situation en
Espagne, et, par suite d'une décision contraignante de la "Grande
Chambre de la Cour Européenne des Droits de l' Homme", cela
vaut aussi pour l'Italie, où survit une discipline analogue. L'arrêt
a sanctionné le fait que l'autonomie de l'Église est prioritaire,
non seulement par rapport à l'État "payeur", mais aussi
par rapport aux opinions de l'individu, confirmant ainsi que l' heure
de religion est un espace confessionnel dans lequel l'enseignement
doit être formellement conforme à la doctrine catholique. La
disposition est prise, elle est passée de justesse : le vote du juge
italien, Guido Raimondi, qui avait déjà voté en faveur de la
présence du crucifix dans les salles de classe, fut décisif, à l'
occasion du recours présenté par Soile Lautsi, membre de l'
UAAR.
Les faits.
Les faits.
En 1991, Antonio Fernandez
Martinez était, déjà, en pratique, un ex-prêtre : il s' était
marié civilement, et avait eu des enfants. Il fut, toutefois, appelé
à remplir la charge de professeur de religion. En 1997, parut, dans
un journal espagnol, un article, accompagné de sa photo, de
soutien au Meceop (Mouvement pour le célibat optionnel), dans lequel
les positions de l' Église catholique, sur la famille et la
sexualité, étaient critiquées. L'Église réagit en lui accordant
la dispense du célibat (demandée, déjà, trente ans auparavant),
la motivant, Code du Droit canon à la main, par le "scandale"
provoqué. Surtout, elle demanda et obtint, du ministère de
l'Éducation, sa révocation de l' enseignement. Fernandez Martinez
présenta un recours. Vaincu dans les salles de classes espagnoles,
il s'adressa à Strasbourg, qui, en 2012, rejeta son recours par six
voix contre une. À présent, la Cour le confirme, définitivement.
La Décision soutient qu'il n' est pas déraisonnable que l' Église
attende une fidélité particulière des professeurs de religion,
étant donné que ceux-ci peuvent être considérés comme ses
représentants. Parce que chaque divergence d'opinions entre la
doctrine et celui qui l'enseigne peut lui causer "un problème
de crédibilité". Par conséquent, soutient la Cour, la
liberté, de l'Église, de pouvoir choisir des représentants en qui
elle a confiance, doit être préservée, et elle est, du reste,
reconnue par l' accord entre l'État espagnol et le Saint-Siège,
passé en 1979.
Les huit juges contraires ont diffusé un avis de minorité, qui met en évidence comment un État ne peut pas ne pas tenir les engagements souscrits avec la Convention européenne sur les Droits de l' Homme, à cause d'obligations contractées avec des réalités non étatiques... Telle est, en effet, la situation du Ministère espagnol : il peut choisir les professeurs de religion seulement parmi ceux qui ont été sélectionnés par l'autorité ecclésiastique. L'autonomie des communautés religieuses ne doit pas, en somme, être considérée comme absolue, et telle qu'elle puisse interférer dans la vie privée et familiale des personnes ; à plus forte raison, s'il s' agit de professeurs au service du Ministère et liés par contrat avec lui. Le Ministère n'a pas non plus pris en compte la possibilité que Fernandez Martinez, aujourd'hui âgé de 77 ans, puisse continuer à travailler pour le système éducatif de l'État.
On prétend que, en Italie, cela aurait pu se faire : la loi 186/2003, en effet, établit, non seulement les modalités de titularisation des professeurs de religion, mais aussi leur passage vers une autre charge, s'ils n'obtiennent plus l'agrément de l'évêque. Une arme à double tranchant dans la main de la Cei (Conférence épiscopale italienne) : la loi lui permet d'éviter des recours légaux, et, dans le même temps, d'introduire ses propres cadres dans l'école italienne. Une contradiction évidente, mais certainement pas l'unique, si l'on pense que même la Décision de la Cour Constitutionnelle, qui, en 1989, reconnaissait la laïcité comme principe constitutionnel suprême, établissant qu'il n'existe aucune obligation de fréquenter ni l' heure de religion, ni l'heure alternative, a sanctionné la compatibilité avec un État laïque, de l'enseignement - payé sur fonds publics - d'une (seule) confession religieuse.
La Cour de Strasbourg, comme c'était déjà le cas pour le crucifix, a donc choisi de reconnaître, aux États membres, une marge d'appréciation : ils sont, en pratique, libres de violer la Convention sur les Droits de l'Homme, au nom de leur propre autonomie d'organisation. Comme pour le crucifix, les raisons fournies ne sont, certes pas, spirituelles ; un État, qui déciderait d' enseigner le satanisme, jouirait des mêmes prérogatives. Mais c'est une bien maigre satisfaction : l'imposition, par la voie politique, de sa propre doctrine, confirme "la grand-route" choisie par l' Église catholique. C'est même la seule efficace, semblerait-il.
À la lumière d'une telle décision, toutefois, il serait opportun de commencer à s'abstenir de magnifier l’œcuménisme et l'ouverture de l'heure de religion. Ce que font, aussi et surtout, les évêques, quand il s' agit de recueillir des inscriptions ; quand il s'agit d'instruire les enseignants, pourtant, ceux-ci ne peuvent, et ne doivent pas, franchir les "Colonnes d' Hercule" de la doctrine et de l'obéissance aux autorités (et seulement aux autorités ecclésiastiques, évidemment). Personne ne met en doute la liberté, des convictions religieuses, de faire le silence sur les désaccords, quand est garantie une possibilité effective de ne plus en faire partie, mais pas quand cette liberté est exercée dans les écoles de l'État, et aux frais de l'État.
C'est une attitude diamétralement opposée à ce que devrait être l'enseignement. S'il est juste que soient fournies, aux étudiants, des notions adéquates sur les religions (mais aussi sur l'athéisme), s'il y a déjà pas mal de doutes que, pour faire cela, il faille un cours spécialement conçu, s'il n'est, en rien, laïque et démocratique, qu'un tel cours soit réservé au seul enseignement de la variante catholique du christianisme, il l'est, si c'est possible, encore moins, que les professeurs soient choisis par ceux qui sont l'objet de leur étude. Que diraient, les catholiques, si le choix de ceux qui doivent enseigner le nazisme était réservé à un représentant d' "Aube Dorée" ? L'enseignement doit être laïque et scientifique; l'heure de religion catholique ne l'est pas. L'admettre serait, au moins, honnête, de la part de ceux qui, souvent, revendiquent la possession de la Vérité.
Raffaele Carcano, secrétaire de l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes
(19 juin 2014)
Les huit juges contraires ont diffusé un avis de minorité, qui met en évidence comment un État ne peut pas ne pas tenir les engagements souscrits avec la Convention européenne sur les Droits de l' Homme, à cause d'obligations contractées avec des réalités non étatiques... Telle est, en effet, la situation du Ministère espagnol : il peut choisir les professeurs de religion seulement parmi ceux qui ont été sélectionnés par l'autorité ecclésiastique. L'autonomie des communautés religieuses ne doit pas, en somme, être considérée comme absolue, et telle qu'elle puisse interférer dans la vie privée et familiale des personnes ; à plus forte raison, s'il s' agit de professeurs au service du Ministère et liés par contrat avec lui. Le Ministère n'a pas non plus pris en compte la possibilité que Fernandez Martinez, aujourd'hui âgé de 77 ans, puisse continuer à travailler pour le système éducatif de l'État.
On prétend que, en Italie, cela aurait pu se faire : la loi 186/2003, en effet, établit, non seulement les modalités de titularisation des professeurs de religion, mais aussi leur passage vers une autre charge, s'ils n'obtiennent plus l'agrément de l'évêque. Une arme à double tranchant dans la main de la Cei (Conférence épiscopale italienne) : la loi lui permet d'éviter des recours légaux, et, dans le même temps, d'introduire ses propres cadres dans l'école italienne. Une contradiction évidente, mais certainement pas l'unique, si l'on pense que même la Décision de la Cour Constitutionnelle, qui, en 1989, reconnaissait la laïcité comme principe constitutionnel suprême, établissant qu'il n'existe aucune obligation de fréquenter ni l' heure de religion, ni l'heure alternative, a sanctionné la compatibilité avec un État laïque, de l'enseignement - payé sur fonds publics - d'une (seule) confession religieuse.
La Cour de Strasbourg, comme c'était déjà le cas pour le crucifix, a donc choisi de reconnaître, aux États membres, une marge d'appréciation : ils sont, en pratique, libres de violer la Convention sur les Droits de l'Homme, au nom de leur propre autonomie d'organisation. Comme pour le crucifix, les raisons fournies ne sont, certes pas, spirituelles ; un État, qui déciderait d' enseigner le satanisme, jouirait des mêmes prérogatives. Mais c'est une bien maigre satisfaction : l'imposition, par la voie politique, de sa propre doctrine, confirme "la grand-route" choisie par l' Église catholique. C'est même la seule efficace, semblerait-il.
À la lumière d'une telle décision, toutefois, il serait opportun de commencer à s'abstenir de magnifier l’œcuménisme et l'ouverture de l'heure de religion. Ce que font, aussi et surtout, les évêques, quand il s' agit de recueillir des inscriptions ; quand il s'agit d'instruire les enseignants, pourtant, ceux-ci ne peuvent, et ne doivent pas, franchir les "Colonnes d' Hercule" de la doctrine et de l'obéissance aux autorités (et seulement aux autorités ecclésiastiques, évidemment). Personne ne met en doute la liberté, des convictions religieuses, de faire le silence sur les désaccords, quand est garantie une possibilité effective de ne plus en faire partie, mais pas quand cette liberté est exercée dans les écoles de l'État, et aux frais de l'État.
C'est une attitude diamétralement opposée à ce que devrait être l'enseignement. S'il est juste que soient fournies, aux étudiants, des notions adéquates sur les religions (mais aussi sur l'athéisme), s'il y a déjà pas mal de doutes que, pour faire cela, il faille un cours spécialement conçu, s'il n'est, en rien, laïque et démocratique, qu'un tel cours soit réservé au seul enseignement de la variante catholique du christianisme, il l'est, si c'est possible, encore moins, que les professeurs soient choisis par ceux qui sont l'objet de leur étude. Que diraient, les catholiques, si le choix de ceux qui doivent enseigner le nazisme était réservé à un représentant d' "Aube Dorée" ? L'enseignement doit être laïque et scientifique; l'heure de religion catholique ne l'est pas. L'admettre serait, au moins, honnête, de la part de ceux qui, souvent, revendiquent la possession de la Vérité.
Raffaele Carcano, secrétaire de l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes
(19 juin 2014)
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