vendredi 4 juillet 2014

LE SEXE DES ANGES

LE SEXE DES ANGES

UAAR – « Le Sexe des Anges »   (extr. de « La Page des
Blogs » de « MicroMega » 4/2014)
http://blog-micromega.blogautore.espresso.repubblica.it/2014/06/11/uaar-il-sesso-degli-angeli/


Un des amis d'Albi (Action laïque Belgo-italienne) a eu la bonne idée de traduire le blog-édito de l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes, publié dans la revue Micro-Mega.
Dans un premier temps, L'Asino nuovo relaie cet intéressant article, traduit par Pierre Steenhout.



«Je viens de rencontrer dans un des plus célèbres musée d'Italie (l'Académie de Venise) un très curieux tableau du peintre Tiepolo (18e siècle) figurant en haut de la composition un angelot de sexe mâle urinant sur ses congénères ailés pour les empêcher d'accéder au nuage sur lequel il est... » (Paul Duchein – rentrant de vacances en 2009 – déclaration à la Dépêche du Midi - http://www.ladepeche.fr/article/2009/09/04/665790-paul-duchein-finisse-sexe-anges.html)




Ces jours-ci, nous apprenons, avec stupéfaction, combien l’éducation sexuelle,« instrument pour garantir la santé physique et psychologique de la population, réduire le nombre des grossesses précoces et contrecarrer la diffusion des maladies » ( objectifs excitants, il n’ y a pas à dire), est une matière obligatoire dans une grande partie de l’ Union Européenne. Avec quelques exceptions : l’ Italie, évidemment, accompagnée du Royaume-Uni, de la Roumanie, de la Pologne, de Chypre, de la Bulgarie et de la Lituanie. Sans entrer dans des détails déprimants (par la confrontation avec l’ arriération qui est la nôtre), du « comment cela fonctionne » dans les pays civilisés, il faut dire qu’une tentative nous l’ avons faite nous aussi, à travers des dizaines de projets de loi naufragés et jamais discutés. Pensons à Lupo Alberto, la bande dessinée, qui, coupable d’ avoir tenté de lier la prévention de l’ HIV à l’ usage du préservatif, aussitôt arrivée dans les écoles (en 1991), fut aussitôt retirée avec encore plus de rapidité. D’ ailleurs, c’ étaient aussi les années du " halo violet" de la campagne de la Fondation "Pubblicità Progresso" (?), qui, outre le fait de présenter " les séropositifs comme de sympathiques empoisonneurs, a aussi ruiné, pour toujours, une grande et belle chanson de Laurie Anderson. Et vingt ans et quelque après, le même sort est réservé aux opuscules de l' "Unar" contre l' homophobie, qui n' ont pas plu au Cardinal Bagnasco, ou pour ceux, parus en Emilie, sur les maladies sexuellement transmissibles, et qui, distribués aussi dans un institut supérieur, sont devenus, dans les titres des journaux, "manuels pour le sexe anal".

Mais, "pour l'amour de Dieu", ne parlons pas de sexe (homosexuel en plus ! Une autre fois !), ni même par le biais de deux lignes d'une lecture de vacances: aussi engagée que soit la solidarité du Ministre Giannini, le corps enseignant du Lycée "Giulio Cesare" de Rome a été, longtemps,  dans l' œil du cyclone, et on a vu arriver, au Parquet, une dénonciation pour "publications de spectacles obscènes et corruption de mineurs". Comme si le passereau de Catulle avait été une affaire de pensionnaires. D'ailleurs, quel besoin aurions-nous, ensuite, de faire de l'éducation sexuelle ? Cela revient à dire qu'il suffirait d' une seule parade, violente : la chasteté. Mais, à ce qu' il paraît, ceux qui la conseillent n' y réussissent pas très bien non plus. Comme si l'éducation sexuelle, avant de préfigurer de fantomatiques orgies, ne concernait pas, aussi et surtout, l'hygiène et la santé physique. Et mentale. Autrement dit, la conscience et l'autodétermination.
Ce n' est pas un hasard si les andrologues ont lancé des cris d' alarme désespérés, à l'abolition du service obligatoire, l'unique examen, dans la vie entière de la majorité des hommes italiens (et, chez des pourcentages très élevés de recrues, on a diagnostiqué des pathologies graves). Actuellement, moins de 20% des "soldats exemptés" n' ont jamais effectué de visite chez un spécialiste. Pour les femmes non plus, quand bien même elles sont plus habituées, bien obligées, chez le gynécologue, cela ne se passe pas mieux: on calcule qu'une jeune fille sur deux n' utilise aucun contraceptif durant sa première expérience sexuelle (la croyance qu'il est impossible de se retrouver enceinte est encore ancrée), et qu'une grossesse sur cinq est non désirée. Nous obtenons quand même le maillot noir européen de l' utilisation de contraceptifs hormonaux (avec des pourcentages égaux à ceux des femmes irakiennes), et des contraceptifs "tout court". Pourtant, les cours dont on parlaitau début (entamés au Pakistan, pour citer un cas), si, dans le passé, ils étaient financés par les Asl (=Santé Publique, Aziende sanitarie locali), sont maintenant confiés à des privés et laissés à la libre discrétion des enseignants. Car, avec le climat qui règne, il est aussi compréhensible que nous n' avons pas à offrir en pâture tout un appui aux critiques prévues de perversion des mœurs, fût-ce même par l' introduction à l' histoire de Maia l' Abeille.

Nous sommes un pays dans lequel on encourage volontairement l'ignorance dans laquelle il baigne déjà, un pays dans lequel ce qui est "sous la ceinture" doit être occulté, caché, enveloppé dans une fausse pudeur néfaste. Un pays dans lequel on ne peut avorter, mais où l'on ne peut pas non plus apprendre vraiment à ne pas mener une grossesse à terme. Un pays où l'on parle beaucoup de violence envers les femmes, mais où l'on n' enseigne pas aux hommes ce qu'est vraiment la sexualité. Où certaines choses ne se disent pas, mais où l'on en fait de pires. Comme si (faire semblant d' ) ignorer l'une de nos expressions fondamentales, dans tous les sens du terme, d'êtres humains, pouvait être sérieusement un bon plan. Comme si frustrations et pathologies étaient préférables à une conscience mature et sereine. Comme si la connaissance et la compréhension de nous-mêmes, de notre corps et de celui d'autrui, était un péché. Oh, eh bien, en effet, pour certains c'est vraiment un péché. Et même parmi les plus graves.
Mais on le sait, la malice est dans les yeux de celui qui regarde.

Adele Orioli, responsable juridique pour l' UAAR - Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes

( 11 juin 2014 )

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